Lettre d'information n°64
Vous avez dit métissage ?
Edito
« La culture n’est pas une marchandise comme les autres !»
proclame-t-on haut et fort de ce côté-ci de l’Atlantique.
Aussi l’Unesco vient-il de se voir ratifier par une majorité
de ses États membres la Convention relative à la
« protection et la promotion de la diversité des
expressions culturelles ». Les États auront désormais le
droit et le devoir de « créer les conditions permettant aux
cultures de s’épanouir », biens et services auront une
« double nature, économique et culturelle, parce qu’ils
sont porteurs d’identités, de valeurs et de sens ». Cette
convention s’inscrit en filiation directe avec celle signée
en 2003 –non ratifiée par la France d’ailleurs– qui ne se
limitait pas aux seuls biens culturels entendus dans le sens
commun, mais reconnaissait pour la première fois la
notion de « patrimoine immatériel » comme un des
éléments constitutifs de la diversité des cultures humaines.
On entendait dans ce terme la prise en compte des
expressions culturelles y compris « traditionnelles »,
notamment celles issues « des populations minoritaires »
et ce, en dehors d’une pittoresque caricature « folkloriste »
dont on les affuble régulièrement et dont la survivance
surannée est probablement à rechercher dans les
« bienfaits » de la colonisation…
Ainsi l’exception culturelle constitue désormais la règle.
Et l’on consacre aujourd’hui la sanctuarisation de
l’espace de nos politiques culturelles nationales, érigées
en archétype.
Récemment, des Rencontres Internationales organisées
par la Région Rhône-Alpes et portant sur ce sujet
questionnaient le rôle et la place que les Régions devaient
prendre dans ce « combat » et dans le contexte de
mondialisation en cours. D’aucuns en ont conclu qu’elles
étaient en première ligne dans celui-ci, porteuses en leur
sein d’identités multiples, voire d’interculturalité, de
singularités culturelles, de langues régionales… et qu’il
fallait, bien plus que les États, s’attacher à développer des
politiques, à l’échelle du territoire, en leur faveur !
De manière presque concomitante, on s’interrogeait un
peu plus haut, dans le cadre des prochaines échéances
électorales, de ce que recouvraient les termes de «
démocratie participative », d’une implication et d’un
engagement du citoyen, de façon plus accrue, dans les
affaires de la cité comme dans celui de l’évaluation
permanente du mandat des élus… et à notre niveau, de
ce qui allait advenir des notions de « démocratisation »
et de « démocratie culturelle ».
Les Centres Régionaux de Musiques Traditionnelles ont
constitué les outils de la politique culturelle décentralisée
de l’Etat en direction des Régions. Ces centres se sont
construits – précurseurs en la matière - autour des deux
principes décrits précédemment : la prise en compte de la
diversité culturelle, celle de l’histoire des identités et des
territoires sur lesquels ces musiques se sont enracinées
d’une part, et la fonction d’opérateur soutenue par une
structure associative fondamentale par les vertus
régulatrices et démocratiques que l’un et l’autre
permettent de mettre en oeuvre, d’autre part.
C’est probablement au nom de ces principes fondateurs
que l’on nous annonce, après un an de discussions avec
l’AMDRA autour d’un possible rapprochement, la
création imminente d’une nouvelle structure régionale qui
absorberait la quasi-totalité des associations à vocation
régionale existantes… Cette architecture nouvelle dont on
nous promet qu’elle garantira nos missions et dont nous
ignorons à l’heure actuelle le périmètre d’activité et le
statut, a au moins une vertu, celle de nous éclairer et de
nous fixer un calendrier proche pour la dissolution du
CMTRA en tant qu’entité associative.
Nous voici donc rappelés à ces bons et vieux réflexes
typiques à notre cher pays : se poser à l’extérieur en
« modèle » (de ce que les autres doivent faire) alors que
chez nous le despotisme éclairé fait rage partant du
principe que celui qui décide est celui qui paie.
Bonne année à tous.
Robert CARO
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Et maintenant, quel avenir
pour le CMTRA?
L’année 2006 s’est terminée au Centre des
Musiques traditionnelles Rhône-Alpes avec la
perspective de changements importants.
Vous savez, notamment par cette Lettre
trimestrielle, que des négociations se poursuivent
depuis de nombreuses années avec les tutelles qui
ont soutenu et porté le projet du CMTRA depuis
1990, pour obtenir des moyens complémentaires
qui permettraient de maintenir les actions, voire de
répondre à des missions essentielles d’un Centre de
Musiques Traditionnelles en région et que nous
n’avons pas eu les moyens de développer jusqu’à
présent.
Nos partenaires ont souhaité que nous nous
associions à l’Agence Musique et Danse Rhône-
Alpes (AMDRA) pour imaginer l’avenir du
CMTRA. Dans cet objectif, nous avons travaillé
durant l’année 2006, en étroite collaboration avec
l'AMDRA pour imaginer le regroupement de
certaines des missions des deux associations dans
l’intention de rendre plus opérant des projets
comme le centre de documentation ou la gestion de
l’information musicale et d’améliorer ainsi le
service rendu aux usagers. Dans son éditorial de
l’automne 2006, Robert Caro présentait cette
démarche et son aboutissement en précisant
qu’une convention de collaboration était proposée
dans : « un esprit de préservation de l’autonomie
politique, de gestion et d’action, indispensables à la
conduite des missions respectives » des deux
entités associatives.
Ce projet de rapprochement n’a pas été validé par
la Direction Régionale des Affaires Culturelles
Rhône-Alpes et la Région Rhône-Alpes qui
souhaitent créer une nouvelle agence régionale qui
comprendrait l’ensemble des services et missions
liés au spectacle vivant.
En tant qu’élus associatifs et représentants des 550
adhérents du CMTRA, nous ne pouvons qu’être
insatisfaits de ne pas avoir su susciter la confiance
de nos tutelles pour pérenniser et maintenir un
projet de Centre Régional de Musiques
Traditionnelles, à la fois dans son autonomie
politique et lié au cadre de coopération conclu avec
l’AMDRA. Malgré cela, le Conseil
d'Administration a pris la décision d'oeuvrer, au
cours de l'année 2007 pour que l’action en
direction des musiques traditionnelles soit
maintenue dans l’attente de connaitre les
modalités de mise en place de la nouvelle
structuration.
Nous vous donnons donc rendez-vous à la
prochaine Assemblée Générale du CMTRA, qui
aura lieu le 14 mai 2007, lors de laquelle des
décisions importantes devront être entérinées
quant à l’avenir du CMTRA, sachant qu’une part
des missions et actions devrait être transférée à la
nouvelle agence régionale, la question se posera
alors du maintien ou non de l’association et de
l’avenir de celles qui ne trouveraient pas leur place
dans le nouveau projet.
Afin de garantir la pérennité d’un outil
d’information comme cette « Lettre d’information »,
nous vous invitons à nous apporter votre soutien
en vous abonnant.
Nous remercions l’équipe des salariés du Centre
qui tout au long de l’année 2006, et malgré la
précarité de l’avenir de l’association, a su mettre
son énergie et ses compétences au service du
développement des projets de l’association.
Murielle Geoffroy
Trésorière du CMTRA