Ballade aux Temps Chauds :
Riccardo Tesi
Santiago Jimenez Jr, Kek Lang ou La kinkerne seront à l'affiche des Temps Chauds de Châtillon-sur-Chalaronne.
Riccardo Tesi sera présent pour une "carte blanche" proposée à Saint-Cyr sur Menthon. Son éternel complice Patrick Vaillant étant lui aussi de l'aventure, au sein de Banditaliana, voici l'occasion d'une interview-éclair avec l'accordéoniste de Pistoia.
Riccardo Tesi : Pour cette "carte blanche", j'invite des musiciens qui habitent sur place, autour de mon Quartet, Bandaitaliana, des musiciens qui ont déjà fait un peu de route avec moi, et avant tout Patrick Vaillant, avec qui j'ai fêté l'année dernière nos dix ans de collaboration. Gabriele Mirabassi sera présent, c'est un super joueur de clarinette qui a participé à mon dernier disque sur "le balo Liccio", et qui a été élu, cette année, meilleur nouveau musicien de jazz d'Italie ! À la contrebasse, Pino Liverato, autre musicien de jazz. À la batterie, Claude Fossati, fils d'Ivano Fossati, grand chanteur italien avec lequel j'ai enregistré l'année passée : son fils est un jeune musicien de vingt-deux ans, très ouvert : il est tombé amoureux de mes disques, on s'est dit que l'on allait faire quelque chose ensemble, il jouera donc sur mon prochain disque, qui sortira au mois de septembre.
Pour ce concert, et avec presque vingt ans de carrière, j'ai décidé de revisiter mes compositions, de les retravailler sous de nouvelles versions en intégrant d'autres musiciens. Ce que je propose, c'est un itinéraire de redécouverte de mes différentes expériences musicales.
CMTRA : La particularité des Temps Chauds, c'est de proposer des rencontres entre professionnels et amateurs. Que penses-tu des musiciens de l'Ain ?
R.T. : Oui, c'est encore autre chose, et c'est prévu pour la première partie du concert. Ça s'appellera "Orchestre Ephémère", je crois ! Ces musiciens sont amateurs, mais ils ont un bon niveau. Ils m'ont proposé des chansons sur des thèmes traditionnels de la région Rhône-Alpes pour que je puisse faire les arrangements. J'en ai choisi dix, dont "Christophe", "Sous ta Fenêtre", "l'Avoine", des bourrées Si la distance nous empêche de répéter beaucoup, j'ai déjà pu jouer deux fois avec eux, et je trouve que c'est très intéressant de travailler des thèmes traditionnels français.
CMTRA : Beaucoup d'accordéon ?
R.T. : Tu sais, lorsque tu fais des arragements, tu prêtes beaucoup attention aux autres, et parfois pas assez à toi-même ! Au contraire je pense que je ne l'utilise pas assez : J'ai plutôt tendance à vouloir découvrir et profiter des autres instruments.
CMTRA : Des vielles à roue, dont la tradition était forte en Bresse, je crois ?
R.T. : Oui, il y a quatre vielles, mais aussi une basse, une batterie, une clarinette, et un bon guitariste. Ils sont tous des environs de Châtillon.
CMTRA : Profitons de notre rencontre pour évoquer ce grand spectacle que tu prépares en Italie.
R.T. : C'est une grosse production qui est présentée à Vercelli près d'Alexandria, Casale Monferato, et tout ça est organisée par Maurizio Martinotti. C'est une sorte de "Bella Ciao" trente ans après, une réunion de plusieurs musiciens qui font tous partie du milieu des musiques traditionnelles en Italie. Ca s'appelle "Transitalia". Il y a Tenores Di Bitti, des chanteurs sardes, Lucilla Galeazzi, Elena Ledda, Daniele Sepe, qui est une espèce de Frank Zappa ethno-jazz-rock napolitain, vraiment extraordinaire. Il y a Ambrogio Sparagna, et moi. Et des musiciens de Calicanto, de La Ciapa Rusa, Martinotti bien sûr, Pietro Bianchi de Lyonesse, Antonello Ricci de Musicanova et d'autres.
CMTRA : Quels sont les objectifs de cette rencontre ?
R.T. : Le spectacle va durer deux heures et demi, j'ai été nommé et chargé des arrangements pour que l'on puisse jouer le plus possible ensemble, et non pas seulement chacun de notre côté : ce serait trop facile. Il y a également une mise en scène théâtrale dirigée par Moni Ovadia, metteur en scène très reconnu en Italie. C'est très enrichissant de pouvoir travailler avec une telle diversité de musiciens. Cela donne des mariages étonnants, par exemple au niveau des voix, nous avons un duo Elena Ledda et Lucilla Galeazzi, ensemble...
Bien sûr on n'a pas pu inviter tout le monde : les problèmes de planning qui se sont greffés. Mais, quand même la formation de l'équipe est de bonne qualité. "Viaggio etnomusicale attraveso il Belpaese".
CMTRA : Quelle est la situation de la musique traditionnelle en ce moment, en Italie ?
R.T. : Effectivement, il y a quelque chose d'intéressant qui se passe ces derniers temps, on voit apparaître beaucoup de chansonniers issus des musiques traditionnelles, et cela nous apporte de nouvelles notoriétés : par exemple, on a un peu moins de mal à expliquer ce que c'est qu'un accordéon diatonique ! J'ai enregistré avec Ivano Fossati et Fabrizio de Andrea, Sparagnia est entrain de travailler avec Francesco de Gregori, etc C'est un moment intéressant. Tu sais, la chanson est un gros moyen de popularité. C'est de la chanson de qualité, du style de Paolo Conte, pas du tout ringard De plus, je trouve que les changements de la classe politique en Italie ont amené un peu plus d'optimisme.
CMTRA : Comment la crise albanaise est-elle perçue par un musicien traditionnel comme toi ?
R.T. : Je pense que cela pose des problèmes économiques, certes, mais qu'il y a aussi des problèmes humanitaires importants : et n'oublions pas que les italiens ont émigré un peu partout En tant que musiciens, nous avons l'habitude de voyager, et nous avons un peu moins le sens du territoire. Donc, nous sommes habitués à accepter cette différence, qui musicalement est toujours très intéressante. Les croisements de population amènent toujours des croisements musicaux, et c'est cela qui me concerne. Si cela pose des problèmes au niveau social, il faut s'habituer, il faut apprendre à "convivre" avec la différence. C'est très important aujourd'hui.
CMTRA : Riccardo, as-tu des contacts avec les communautés italiennes aux États-Unis ?
R.T. : Non, pas du tout. J'ai un peu évité l'Amérique, moi Avec Ritmia, nous devions y jouer, notre disque était sorti là-bas. Mais alors j'ai trouvé ma femme, et je me suis dit "Tiens, j'y vais pas !"