Un collectage de traditions musicales ?

Collecter la mémoire de l’Autre passe avant tout par une rencontre. Par la parole, les gestes, les regards, la personne rencontrée s’exprime, se livre, donne à entendre, à comprendre, à imaginer... La parole et l’image enregistrées deviennent alors mémoire.

En ethnologie, collecter, c’est écouter et retranscrire ces dires et ressentis pour les transmettre à une collectivité. La mémoire enregistrée peut ainsi devenir collective.
Chaque activité humaine a des particularités universelles dont l’étude (ethnographique notamment) permet d’appréhender les spécificités culturelles : cuisiner, s’habiller, voyager, chanter… se font partout de la même manière et différemment.
La musique est alors un prisme particulier pour découvrir d’autres cultures en ce qu’elle mêle recherche esthétique et expression personnelle, toutes deux étant les fruits d’une imprégnation collective, de modèles culturels.


A l’aide d’une caméra ou d’un micro enregistreur, le collectage de musique mêle généralement moments musicaux et discussions sur les conditions d’exécution musicale et sur le parcours particulier de la personne rencontrée.
Le matériel d’enregistrement étant souvent intimidant, un temps d’adaptation est nécessaire à l’instauration d’un climat de confiance entre le « collecteur Â» (l’ethnologue) et le « collecté Â» (le musicien-chanteur). Ce dernier va livrer des trésors personnels qu’il garde généralement en lui, intimement.
La musique fait partie de ces liens, de ces fils ténus qui relient les gens à leur passé, à leur ailleurs, à leur entourage. Petits bouts de mémoire fragile en constante recomposition, les chansons survivent fébrilement à de nouveaux contextes, de nouvelles ritualités, souvent elles tombent dans l’oubli. Collecter la musique de l’autre est une manière de rencontrer les gens, en partageant avec eux la richesse et la poésie de leurs mondes intérieurs.

Après une période d’investigation sur le territoire de la Côtière en mai 2005, des rencontres avec des musiciens professionnels, amateurs et « porteurs de mémoire musicale Â» (des musiciens ayant une pratique musicale privée, confidentielle) ont abouti à une dizaine d’enregistrements filmés, comprenant des entretiens et des moments de musique.
Avec cette matière collectée, plusieurs actions ont été choisies pour valoriser les ressources musicales du territoire : d’une part la restitution, la mise à la connaissance du public par l’édition de cet outil pédagogique sous forme de DVD, ainsi que l’organisation de concerts. D’autre part le dépôt et l’archivage des différents documents (audios, vidéos, écrits), consultables à l’Addim de l’Ain et au CMTRA.
Cette démarche a pour but de valoriser la diversité culturelle, favoriser les dialogues interculturels et accompagner la création artistique.