Jazz et musiques du monde à Vienne
Entretien avec Jacques Launay, directeur du festival Jazz à Vienne.
CMTRA : Jacques LAUNAY, vous dirigez le festival Jazz à Vienne, 23e édition en 2003, ainsi que la programmation des concerts proposés au Théâtre Antique de Vienne durant l'été. Dans ces deux manifestations figurent depuis longtemps des artistes et groupes qu'on peut classer sous l'étiquette "musiques du monde". Comment choisissez vous ces artistes ?
Jacques Launay : Tout d'abord, le sens exact de l'appellation "musiques du monde" m'a toujours échappé. Ce dont je suis sûr, c'est qu'en tant que responsable de Jazz à Vienne, je tiens à la présence dans ce festival de musiques d'ailleurs en lien avec le jazz. La dernière nuit du festival notamment est, pour moi, un clin d'œil à l'origine du jazz, c'est-à-dire à l'Afrique.
C'est une nuit festive, du 13 au 14 juillet, qui dure jusqu'au petit matin, et depuis quelques années, nous tenons à cette connotation africaine. Je tiens également pour cette soirée à la présence de musiques " cousines ", aux formes de jazz qui vont à la rencontre de musiques traditionnelles d'Europe de l'Est, d'Afrique, d'Amérique du Sud ou d'ailleurs.
Dans le festival, nous avons également la présence régulière et forte des musiques cubaines et brésiliennes, de la variété aux expressions plus traditionnelles, avec l'idée que le jazz et les musiques brésiliennes ou cubaines ont historiquement toujours eu des choses à se dire ! Toutes ces propositions sont des cousinages, des rencontres qui m'intéressent au plus haut point. Ce sont des échanges qui en général poussent la musique assez haut.
En dehors du festival Jazz à Vienne, j'ai d'autres casquettes. Avec ma casquette "producteur", je propose dans le même lieu d'autres concerts, par exemple la "Nuit Celtique", le 15 juillet 2003. Ce genre musical très vaste, dans la dynamique instaurée par le festival Interceltique de Lorient, a généré des musiques vraiment intéressantes, qui ont également des choses à se dire avec le jazz, comme par exemple avec Didier Squiban, ou les frères Pellen.
Dans l'univers des musiques celtiques, il y a des choses très belles, très festives, et je suis moi-même d'origine bretonne (personne n'est parfait !), ce qui est une autre raison, très égoïste de proposer cette "Nuit Celtique". Nous travaillons avec Jean-Pierre Pichard, directeur du Festival Interceltique de Lorient et des Nuits Celtiques au Stade de France, et depuis quatre ou cinq ans, nous avons développé un réseau d'échange avec quelques-uns des meilleurs musiciens bretons.
Dans la programmation Jazz à Vienne 2003, les musiques cubaines et africaines sont très présentes, ainsi que d'autres traditions proches du jazz, comme les musiques de Louisiane.
Nous avons déjà rendu hommage aux traditions de Louisiane, et deux des artistes programmés cette année sont déjà venus à Vienne. Les histoires de la Louisiane et du jazz sont fortement imbriquées. La Nouvelle-Orléans est la ville où est né le jazz, et en cette année 2003, il y a une occasion spéciale : l'État de Louisiane nous a proposé de célébrer le bicentenaire de la cession par la France aux Etats-Unis de la Louisiane.
Bonaparte, alors Premier Consul, a cédé le 30 avril 1803, pour 80 millions de francs destinés à financer ses campagnes européennes, la Louisiane qui, à l'époque, montait jusqu'à la frontière canadienne, et englobait un gros quart des Etats-Unis d'aujourd'hui. Nous avons conçu un week-end entier sur cette thématique, en partenariat avec l'État de Louisiane. Nous aurons Zachary Richard, des brass-band, et d'autres formations, ainsi que de la cuisine cajun pendant deux jours.
En ce qui concerne la culture cubaine, nous accueillons Buena Vista Social Club avec Ibrahim Ferrer, dans la dynamique du succès phénoménal de la première version, c'est l'année où il faut le présenter, 30 musiciens, un plateau exceptionnel ! Nous présentons dans la foulée le projet, encadré par l'AMDRA, de résidence de la Banda de Santiago de Cuba, qui travaille dans la région Rhône-alpes pendant une quinzaine de jours avec des harmonies, des groupes de musique, en collaboration avec de nombreuses institutions régionales. Ils seront là également le 28 juin dans Vienne pour faire la fête cubaine.
La dernière nuit de Jazz à Vienne 2003 sera très marquée par les musiques du monde, avec entre autres Oumou Sangaré et l'Orchestre Arabo-Andalou de Tanger, au service du dialogue musical entre les cultures et entre tradition et création.
Le 15 juillet, pour notre nuit celtique, hors Jazz à Vienne, nous accueillons Alan Stivell, figure emblématique du genre, dans une forme intimiste, Carlos Nuñez, qui avait enflammé le théâtre antique l'an dernier, dans un nouveau projet avec de nombreux invités, et I Muvrini, pour une création spéciale avec le Bagad de Brest. Ce sera une belle nuit. Enfin, pour le 14 juillet, nous aurons dans la ville de Vienne des ensembles de fest-noz, " bals bretons " du 14 juillet, qui annonceront les concerts du 15.
Propos recueillis par J.B.
Contacts, réservations :
Jazz à Vienne,
21, rue des Célestes,
38200 - Vienne
04 74 78 87 87
http://www.jazzavienne.com