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Los Andaluces

Alberto Torres est unanimement considéré comme l'un des meilleurs guitaristes flamenco de Lyon, et même au-delà.

Animateur aux côtés du chanteur Lorenzo Gines et de la jeune danseuse Vanessa Amaya, du groupe Los Andaluces, il figurera sur la compilation Flamenco à Lyon publiée par le CMTRA en septembre. Rencontre avec Alberto, suite à leur mémorable concert du Bartoldi de mai dernier.
Entretien avec Alberto Torres CMTRA : Alberto Torres, comment as-tu débuté dans le flamenco en vivant à Lyon ?

Alberto Torres : J'ai commencé à apprendre la guitare à l'âge de 15 ans, avec mon cousin Norbert Torres qui est maintenant très connu dans le monde du flamenco en Espagne. Il est devenu une référence dans le monde des penas flamencas d'Andalousie, même s'il est né en France, à Saint-Fons. Et donc, j'ai commencé la guitare avec lui. J'étais captivé par la guitare flamenca, par les chants que mon père chantait à la maison. CMTRA : D'où viennent les Torres, ta famille? Quand sont-ils venus en France ?

A.T. : Mes parents sont originaires d'Almeria. Ils sont venus en France en 1961. Je suis pratiquement né en France puisque j'avais un mois lorsque nous sommes arrivés ici ! CMTRA : Ton amour de la musique s'est donc développée dans ce bain familial "flamenco" ?

A.T. : Oui, déjà avec mon cousin Norbert Torres. Puis, mon premier professeur, celui à qui je dois tout l'amour de la guitare flamenca, n'est autre que Lorenzo Gines, le chanteur de Los Andaluces aujourd'hui.

Je ne cache pas d'ailleurs que la première fois que je l'ai entendu jouer du flamenco, j'ai eu la même impression et le même bonheur que la première fois que j'ai vu Paco de Lucia jouer en concert. Alors, évidemment, cela fait hurler de rire Lorenzo ! Il vient de Cordoba, et c'est quelqu'un d'extraordinaire, qui a l'amour de cette musique, et qu'il communique à tout le monde. C'est cet amour qu'il m'a transmis.

Ensuite, je me suis formé d'une manière autodidacte en écoutant des disques et en repiquant tout ce que je trouvais de beau chez les guitaristes de flamenco. CMTRA : As-tu rencontré des guitaristes en Espagne ?

A.T. : J'ai aussi pris quelques cours avec Tomas Navas, un excellent musicien qui habitait Lyon, mais qui maintenant s'est installé en Espagne. Puis, en 1982, avec mon cousin et quelques copains nous avons participé au premier cours international de guitare flamenca de Sanlucar de Barrameda. Manolo Sanlucar donnait lui-même les cours. CMTRA : Tu avais quel âge ?

A.T. : J'avais 21 ans. À l'époque, j'ai connu quelqu'un qui n'avait que 15 ans, qui est devenu plus tard Vicente Amigo. C'était son premier stage de guitare, et il voulait en faire sa carrière, nous avons sympathisé, et tu vois maintenant la carrière qu'il fait aujourd'hui ! CMTRA : Comment expliques-tu qu'il y ait autant d'Espagnols sur Lyon ?

A.T. : Je pense qu'il y a eu deux vagues d'immigration : une vague d'immigration politique suite à la guerre civile, beaucoup d'Espagnols se sont réfugiés dans la région pendant la seconde guerre mondiale, pendant laquelle ils ont eu un rôle très actif dans la résistance. Et puis, une deuxième vague d'immigration, cette fois plus économique dans les années 50-60.

Il y a pas mal d'industries dans la région, et je pense que c'est pour ces raisons que nous trouvons autant d'Espagnols dans la région Rhône-Alpes. Mon père a travaillé pratiquement toute sa vie dans les produits chimiques à Saint-Fons. CMTRA : Existait-t-il des réseaux espagnols, des amicales ?

A.T. : Il n'y avait pas grand chose, en dehors des cercles restreints d'amis. Il y avait des quartiers : Vénissieux, Moulin à Vent, issus d'une colonies d'Espagnols très unis. Ils ont créé dans les années 70 le "Centre Espagnol". Ce Centre reste encore aujourd'hui le plus important, la plus grosse association dans la région pour faire connaître la culture espagnole. CMTRA : Comment expliques-tu que tant de jeunes, qui font partie de la nouvelle génération, s'intéressent au flamenco aujourd'hui ?

A.T. : Il y a sur Lyon quelques grandes familles flamenca qui se sont créées il y a longtemps, comme la famille Diez, ou encore Monsieur Gomez, un guitariste de Saint-Priest dont les filles étaient danseuses. Et toute une génération à peu près de mon âge, entre 37 et 40 ans.

Il y a eu bien sûr Lorenzo très connu dans le milieu flamenco sur Lyon et un peu partout. Lorenzo m'a donné des cours, mais a également enseigné la guitare flamenca à d'autres personnes. Par la suite, moi-même j'ai enseigné pendant 15 ans au Centre Espagnol de Venissieux. Et toute cette jeune génération comme Jean-Marc Rodriguez, Juan Carlos Principal, un tas de jeunes qui sont devenus d'excellents guitaristes, qui en vivent parfois, tous sont passés par le Centre, qui est un peu leur "berceau". CMTRA : Tu as créé le groupe Los Andaluces ?

A.T. : C'est Lorenzo Gines le fondateur: Dans les années 79-80, on s'est dit "monter un groupe: pourquoi pas ?", avec Lorenzo, deux danseuses Sophie et Édith, mon cousin Norbert et moi-même. C'était "Los Andaluces".

Dans ces années-là il n'y avait que deux groupes importants sur Lyon, Los Andaluces et "Las Hermanas Sevilla" qui n'existe plus, à ma connaissance. À l'époque nous avons beaucoup travaillé : on a fait des spectacles un peu partout, notamment en première partie de "Carte de Séjour", au Théâtre Antique de Fourvière, où nous avons jouer devant 10 000 personnes en 1985 ! Nous avions fait un tabac, en plus nos deux danseuses étaient très belles... l'une d'entre elles Sophie a d'ailleurs été élue Miss Lyon et 1ère dauphine de Miss France la même année !

C'était un concert extraordinaire. Avec un public qui n'était pas vraiment habitué à écouter du flamenco : quand nous sommes montés sur scène nous étions tous très impressionnés par la foule. Je disais à Lorenzo : "Tu ne vas pas leur chanter du flamenco... il faut leur jouer des rumbas, des choses comme cela..." Et, Lorenzo m'a dit : "Non, je veux leur chanter une solea." Il a pris le micro et a dit au public : "Je vous préviens, je vais vous tuer ! C'est du flamenco et c'est comme cela !" Eh bien, il a chanté une solea dans un silence de cathédrale ! C'était impressionnant. Lorenzo a un charisme, il est sincère et se donne toujours à fond, et le public le sent...

À la suite de cela, Vanessa (Diot-Amaya) et Sabrina (Romero) ont commencé à venir prendre des cours de danse au Centre espagnol à l'âge de 6-7 ans. La relève s'est donc faite, Vanessa et Sabrina sont devenues les nouvelles danseuses du groupe Los Andaluces. Actuellement Sabrina ne fait plus partie du groupe. Nous sommes une grande famille quand même... CMTRA : Comment vois-tu aujourd'hui l'évolution du flamenco à Lyon : va-t-il rester restreint à la communauté espagnole ?

A.T. : Non, je pense que c'est en train de s'ouvrir. Dans les années 80, nous étions un des rares groupe à jouer du flamenco, nous avions beaucoup de travail. Or, maintenant, il y a une multitude de groupes, avec certains qui font un travail tout à fait correct, mais d'autres... et ce sont eux qui cassent un peu l'essor du flamenco.

En général le flamenco fait souvent figure d'animation, les organisateurs recherchant avant tout une ambiance, et c'est ainsi qu'ils choisissent les tarifs les plus bas. Nous n'avons pas de CD.

Personnellement, j'ai travaillé avec Nilda Fernandez. Mais, notre groupe est un peu en dehors de la réalité : nous jouons en famille. Notre vrai plaisir est de jouer sur scène, et quand on sent que le public est réceptif, le plaisir est complet.


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