Le Folk-club de Couzon-au-Mont-d'Or
Entretien avec Anatole Benoit et Stéphane Mauchand.
CMTRA : Anatole Benoit, tu as fondé avec quelques compères un folk-club. Qu'est-ce qu'un folk-club en 1998 ?
Anatole Benoit : Un folk-club en 1998, c'est avant tout un lieu assez sympathique, un petit caveau dans un petit village des Monts d'Or, à Couzon aux Monts d'Or. Dans ce lieu j'ai essayé de réunir tous les musiciens qui habitent déjà dans le nord de Lyon, afin qu'ils aient un endroit où se rencontrer et où ils puissent échanger tout ce qu'ils savent sur la musique traditionnelle.
CMTRA : On a connu dans les années 70 une expérience des folks-clubs sur Lyon avec La Chanterelle, cela correspondait à une époque, à un contexte social où des choses importantes se sont déroulées. Est-ce que dans ta démarche, il y a une part de nostalgie de ces folks-clubs ?
A.B. : A mon avis, il y a 90 % de nostalgie. Ce que j'ai beaucoup aimé dans le folk-club de La Chanterelle il y a 25 ans, c'est effectivement cet endroit où les gens pouvaient se retrouver avec peu de bagage musical et culturel autour de la musique traditionnelle, et malgré cela, grâce aux amitiés, grâce à une énergie que chacun apportait, de nombreux groupes ont pu se créer.
Aujourd'hui c'est cet état d'esprit que j'essaye de recréer. Nous l'avons, en aparté, déjà expérimenté depuis quelques mois, et cela fonctionne bien : il y avait 4 ou 5 musiciens qui étaient complètement éparpillés, l'un s'est mis à la flûte, d'autres se sont mis à chanter, puis une cornemuse est sortie, une harpe celtique s'est ajoutée et au bout de quelques mois, le groupe s'est constitué. Ils ont déjà joué à la fête de la musique de Couzon aux Monts d'Or. Donc, on retrouve cette même "alchimie magique" qui existait il y a 25 ans. C'est vraiment le but recherché.
CMTRA : Concrètement, comment le folk-club va-t-il fonctionner ?
A.B. : Il y a déjà un lieu semblable, qui s'appelle le C.C.O à Villeurbanne, avant tout axés sur la danse, et ouvert le 1er et le 3ème mercredi de chaque mois. En alternance avec eux, nous voulons proposer le 2ème et 4ème mercredi de chaque mois, un lieu d'écoute de la musique, j'allais dire uniquement, mais si quelqu'un veut danser, cela n'est pas interdit, mais, déjà le lieu ne s'y prête pas, et puis on souhaiterait pousser les musiciens et les spectateurs à mieux écouter la musique traditionnelle.
CMTRA : C'est un lieu avec une architecture intéressante, et je crois que cela te touche particulièrement ?
A.B. : Oui, je suis musicien mais aussi architecte, et ce lieu est un petit caveau tout en pierres dorées, rejointées, très traditionnelles de tout le pays de carriers, dont Couzon aux Monts d'Or fait partie. Le lieu est donc assez chaleureux, il y a un coin pour faire un bar, un coin pour les loges, et un coin plus grand pour accueillir les gens, jusqu'à une quarantaine de personnes. Ce n'est pas une salle de spectacle, mais un lieu d'écoute intimiste qui a déjà une certaine poésie.
CMTRA : Quand tu dis intimiste, cela veut dire acoustique ?
A.B. : Acoustique évidemment, ce terme est même déjà trop fort, surtout pour les cornemuses... On a un petit problème de résonance, la cornemuse de Stéphane qui est particulièrement sonore couvre un peu trop les autres instruments... Mais, on va essayer de résoudre cette question par un traitement du sol.
CMTRA : Comment les musiciens et les groupes vont-ils pouvoir accéder à ce lieu ?
A.B. : Il faut que les gens se manifestent en nous contactant, soit moi, soit Stéphane Mauchand. Puis, nous organiserons les passages des musiciens de manière à ce qu'il n'y ait pas de mercredi surchargé et d'autre sans musiciens. Sachant qu'au niveau des musiciens couzonnais, nous avons de quoi animer toutes les soirées des mercredis, si jamais personne ne se présente. Les musiciens provenant de l'extérieur sont tout de même les bienvenus, et apporteront, j'en suis sûr, une nouvelle touche.
CMTRA : On parle de musiciens, de musique, mais quels types de musiques le folk-club va-t-il accueillir ?
A.B. : C'est déjà sous-entendu, nous sommes ouverts à toutes les musiques traditionnelles, et pas uniquement les musiques traditionnelles des Monts d'Or, car cela me semble un peu limité !
CMTRA : Y-a-t-il le désir d'ouvrir ce folk-club à d'autres cultures du monde ?
A.B. : Dans l'immédiat nous n'avons pas cette ambition. Notre objectif est déjà de faire connaître la musique traditionnelle du centre de la France, du Dauphiné, de la Savoie, et de toutes les régions aux alentours de Lyon, en offrant un lieu d'écoute et d'échange. Pour le village, ce sera déjà bien.
Après, le folk-club en tant qu'entité au milieu du monde des musiques traditionnelles françaises, je pense qu'il arrivera un moment où nous suivrons le courant général. Mais, mon désir est déjà de mener à bien ce projet de folk-club, et d'espérer que dans les années à venir, ce lieu ne soit plus seul, et que fleurisse dans les villages à proximité de Lyon, une multitude de folk-clubs.
Car, pour l'instant, nous sommes loin d'avoir une symbiose des musiciens des Monts d'or. Nous nous sommes donné un an pour réussir à fidéliser les musiciens les plus proches : se créer des musiciens, et se créer un public qui serait sensé venir écouter ses propres musiciens sachant qu'il y est une interaction totale, que les musiciens peuvent devenir public et inversement.
CMTRA : Stéphane Mauchand, en tant que jeune musicien, qu'est-ce qui t'a poussé à t'embarquer dans ce projet avec Anatole Benoit ?
Stéphane Mauchand : Tout d'abords, je suis couzonnais depuis peu de temps, il y a donc une proximité et un intérêt à aller jouer à Couzon, et le fait de rencontrer les musiciens locaux m'intéresse beaucoup. Je rejoins surtout Anatole dans le domaine de la musique qui ne soit pas seulement à danser, mais à écouter.
Bien que la musique traditionnelle soit très propice à la danse, je trouve qu'aujourd'hui, il manque encore et cela de manière spontanée des endroits pour écouter la musique, à part les bars où l'on peut voir de plus en plus de concerts de musique traditionnelle. Je pense qu'un lieu comme celui-là où l'on peut se rencontrer et vraiment écouter, cela me semble important.
A.B. : En plus, il se trouve que Couzon aux Monts d'Or est une véritable communauté villageoise, ce qui est assez rare près d'une grande ville. Et, contrairement à ce qu'on peut croire, sur 2500 habitants, il y en a peut-être 1000 qui considèrent Couzon comme une cité dortoir, mais les 1500 restant sont des couzonnais de souche ou des gens rapportés qui s'investissent dans la vie associative, très présente : Couzon a deux carnavals dans l'année, il y a des jeux inter-quartiers et énormément de manifestations culturelles d'un haut niveau. Ce folk-club a donc été très bien accueilli par la municipalité, et a tout de suite été intégré à d'autres associations par des participations à des spectacles de rues et à diverses manifestations. Ce qui m'intéresse, c'est de voir jusqu'à quel point je peux faire accepter et faire intégrer la musique traditionnelle dans la vie de tous les jours d'un petit village.
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Le Bec à Sons
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