Chants libres, enfin!!!
Un rendez-vous hebdomadaire avec les musiques traditionnelles sur France3

Entretien avec Odile Mattei et Adrien Groux-Radenez Pour la première fois dans l'histoire de la télévision en France, une émission hebdomadaire est née, dont l'objet de passion est la musique traditionnelle dans tous ses états.

Cette émission, rêve des musiciens et mélomanes concernés depuis des décennies est l'aboutissement d'un projet venu de loin, tenace, et fruit de l'expérience d'une femme, Odile Mattei, grande professionnelle de la télévision de terrain, proche des gens, à l'écoute attentive de leur parole, de leurs espoirs et de la simplicité de leurs souhaits.

Ce n'est pas un hasard si France3, chaîne publique qui a su prouver au fil des années son incomparable savoir-faire dans le champ de la télévision de proximité, prend une telle initiative, mais c'est un honneur et un bonheur que ce soit France3 Rhône-Alpes/Auvergne qui, la première, propose à ses téléspectateurs un rendez-vous hebdomadaire, une chance régulière de découvrir ou redécouvrir les richesses musicales présentes dans ces deux régions, dans leur diversité et leur vitalité. CMTRA : Odile Mattei, vous êtes connue et reconnue des téléspectateurs de France3 Rhône-alpes/Auvergne par votre émission Pousse-Café, qui nous fait voyager depuis 6 ans dans les endroits les plus secrets et les plus magnifiques de l'Auvergne et de la région Rhône-Alpes, à la rencontre des gens qui y vivent, et, maintenant, vous nous proposez un nouveau rendez-vous :

Odile Mattei : Oui, une émission qui commence le samedi 12 septembre à 16h 30, et qui s'intitule"Chants Libres", qui dure 15 minutes, avec 10 minutes de musique traditionnelle, avec des gens qui habite en région Rhône-Alpes/Auvergne, et qui jouent de la musique traditionnelle. Musique traditionelle au sens le plus ouvert, le plus vaste possible, la musique du monde, de toutes les origines, sans aucune restriction ; c'est ce qui est intéressant.

On pourra entendre des groupes musicaux d'expression régionale, comme Patrick Bouffard, Roulez Fillettes, et des formations comme Doumka, Omar El Maghrebi, Aguadulce, Aligoélément et bien d'autres, qui proposent d'autres traditions musicales, des mémoires venues d'ailleurs et vivantes ici. Adrien Groux-Radenez : Nous donnerons à voir toutes les formations qui s'appuient sur les répertoires traditionnels pour faire toutes sortes de musiques, jouées par des groupes qui vivent en région, et qui s'appuient sur les répertoires de la région Rhône-Alpes/Auvergne ou sur des répertoires venus de plus loin. On a envie que ce soit très ouvert. O.M. : Dans Chants Libres, il y aura très peu de plateau. Priorité à la musique! A.G-R. : Dans chaque émission, chaque groupe pourra jouer deux morceaux, il y aura un peu de temps d'interwiew, et un agenda pour rapeller les dates de concert et les adresses importantes. Et un troisième morceau pour lancer l'émission suivante, avec le groupe invité la semaine d'après, et ainsi de suite tout au long de l'année. O.M. : Ce qui nous intéresse, tout au long de l'année, dans notre travail avec Pousse-Café et Chants Libres, c'est la mémoire des hommes. Cette émission Chants Libres est un moyen de transmettre cette mémoire, ces musiques qui remontent à la nuit des temps, et qui sont interprétées par de jeunes musiciens aujourd'hui. C'est le mystère de la transmission de ces cultures du monde qui nous fascine et nous séduit.

Depuis trois ans, nous avons envie de cette émission sur les musiques traditionnelles. Les musiciens que nous contactons nous accueillent de manière très simple et géniale, comme si nous nous connaissions depuis toujours. Nous avons dans notre bureau un lecteur de CD tout neuf, et nous faisons écouter aux techniciens du son les disques que nous transmettent les groupes, les gars du son sont emballés, ils nous suivent, ils sont vraiment contents de pouvoir faire cette émission de musique. Il y a toute une énergie qui est porteuse ici, espérons qu'elle va s'amplifier. Nous découvrons des musiques, des musiciens, dont nous ne soupçonnions l'existence dans la région. A.G-R. : Avec Aquartet, j'ai découvert une manière de jouer de la vielle à roue que je n'avais jamais entendue, j'ai découvert avec stupéfaction ce que fait Doumka avec les clarinettes, c'est un bonheur d'entendre des sons et des instruments différents, et c'est ce bonheur que nous voulons partager. O.M. : Patrick Bouffard a accepté d'être le parrain de Chants Libres, et nous a envoyé un texte qui défini bien l'idée de l'émission : "Les musiques "trad" sont depuis la nuit des temps la mémoire des cultures du monde. Elles ouvrent à travers leurs chants libres l'expression d'une oralité pluriculturelle.

La gestion permanente de ces traditions populaires, la diversité de leurs particularismes, en font une musique vivante qui, de par sa créativité, résonne dans le cur et l'âme de tous les citoyens du monde, constituant la richesse de L'HUMANITE."

C'est une belle définition de la musique traditionnelle, et de Chants Libres. Il est question de citoyen, et ça nous amène à élargir l'idée de musique, culturelle, à une dimension humaine, plus complète, plus globale. C'est ce qui est intéressant, c'est ce que nous recherchons. J'ai rencontré un agriculteur, dans la vallée de Haute-Tarentaise, qui m'a expliqué qu'il fait du vrai "persillé", à la méthode ancienne, comme son grand-pêre lui a appri, et il me dit que son fils est géographe, et qu'il est parti en Turquie, en vacance, et qu'il a observé que là-bas, ils font le même "persillé".

C'est ça qui est intéressant : ici, dans un coin d'Auvergne ou de Rhône-Alpes, on joue de la vielle, de la musique d'une certaine manière, avec un certain style, et peut-être en Turquie ou en Yougoslavie, existe le même instrument, la même manière d'en jouer, le même air Et si ces musiques traditionnelles étaient l'occasion de comprendre nos ressemblances, nos différences, si elles permettaient la découverte de l'autre, en toute tolérance et fraternité. A.G-R. : L'émission se tournera dans des lieux divers, de manière itinérante, peut-être au début au Musée d'Art Contemporain de Lyon, en tout cas des lieux choisis avec l'idée de contraste entre l'image "traditionnelle" de la musique traditionnelle et un cadre très contemporain, très neuf. O.M. : C'est vrai qu'il faut faire attention à ce que peut cacher le mot tradition, une image vieillote, désuète, réductrice. On s'est dit que peut-être, sans prétention, on peut essayer d'éveiller l'attention des téléspectateurs par le décalage entre le lieux et l'image préconçue des musiques traditionnelles qu'on va leur présenter. A.G-R. : C'est une idée qui attire les musiciens de musique traditionnelle, avoir un décor très contemporain pour cette émission, ça leur plait. O.M. : Oui, ils jouent des morceaux anciens avec leurs tripes d'aujourd'hui, leurs angoisses, leurs bonheurs, leurs difficultés. C'est la vie d'aujourd'hui. A.G-R. : On pense à des lieux comme l'Opéra de Lyon ou d'autres musées d'art contemporain, comme le musée de Saint-Priest, celui de Villefranche, ou de Saint-Etienne. La décision ne nous appartient pas. O.M. : Et le musée de Montluçon, dédié aux musiques populaires, et dirigé par Sylvie de La Salle ! CMTRA : Les répertoires de musiques traditionnels sont très souvent indissociables de la danse, comme pour la bourrée d'Auvergne, le flamenco ou la danse orientale, avez-vous un projet à ce sujet ?

O.M. : Dans un premier temps, nous serons prudents, nous souhaitons rôder l'émission. Notre souhait premier est d'avoir une émission en public, ce qui me semble correspondre à la réalité, à la vérité des musiques traditionnelles, où les émotions doivvent circuler, et se partager.

Dans trois mois, nous serons hyper-rodés! et alors, pourquoi ne pas inviter les téléspectateurs aux enregistrements, faire une fête, un événement de chacune de ces émissions. J'ai confiances en ces musiques.

Avec Pousse-Café, nous recevons des lettres de gens qui nous remercient de manière très forte, très simple, très émouvante, des sujets qu'on aborde, qui les concernent directement dans leur parcours individuel, c'est plus fort que la nostalgie, c'est la force de la mémoire, de la connaissance de soi, c'est la vie. Quand on est bien avec soi, on est bien avec l'autre, non ? Chants Libres : chaque samedi à 16h 30 sur France3 Rhône-Alpes/Auvergne. Générique réalisé par Jean-Marc Greffra. Réalisation de Chant Libre : Bernard Vasseur. Renseignements : Tél : 04 72 34 44 36