La danse à l'Université Lyon 2
Entretien avec Alexis Chvetzoff, vice-président à la vie universitaire culturelle et sportive.
CMTRA : Alexis Chvetzoff, vous êtes membre de l'équipe présidentielle qui dirige l'Université Lyon 2, et vous avez en charge les pratiques culturelles et artistiques à l'université, dont la classe danse-étude. Ces enseignements sont-ils en rapport avec le développement très dynamique des danses du monde ?
Alexis Chvetzoff : Oui, bien sûr, ce développement génère l'engouement de plus d'un millier d'étudiants, chaque année, à pratiquer la danse de manière optionnelle, en plus de leurs études, dans le cadre de nos structures sportive et culturelle.
Nous proposons plusieurs types de danses, jazz, contemporain, danse africaine, capoeira, danse classique, rock, tai-chi-chuan. Danse-étude est un peu la tête de pont de haut niveau universitaire pour les étudiants ayant déjà un gros bagage technique et artistique, et souhaitant explorer davantage les possibilités d'orientation vers les métiers de la danse. Il s'imposait à nous de créer une structure qui permette à ces étudiants d'approcher la réalité de la pratique de haut niveau en danse, avant de choisir éventuellement la danse professionnelle, (ou que la danse les choisisse). Il s'agit donc d'une structure intermédiaire d'orientation, pour les étudiants qui sont souvent entre le rêve et la réalité.
La pratique amateur s'exprime aussi dans le bal. On voit éclore des bals qui se réfèrent à des traditions de répertoire, comme le nouveau bal musette, ou à des pratiques plus lointaines, comme le tango, la capoeira, et bien d'autres. Y-a-t-il des connexions envisageables entre les filières associatives qu'on voit surgir en permanence, qui préparent à ces formes d'expression, et l'univers dans lequel vous construisez votre action, le milieu universitaire ?
La caractéristique du bal par rapport au cours de danse, c'est qu'il y a bien moins d'espace (par danseur). C'est bien souvent de la danse sur place. Notre projet de formation doit aller au-delà, mais pour s'exprimer dans le bal, il faut accepter de danser, de se montrer, de se mettre en jeu. Se pose la question de la culture chorégraphique commune minimale. C'est souvent là le point de départ de l'étudiant pour venir danser. Cela restera un moteur permanent dans sa démarche, mais nous évoluons rapidement vers une pratique chorégraphique approfondie.
On voit bien que dès lors qu'un madison est proposé, de nombreuses personnes viennent danser ce petit pas chorégraphique mémorisable in situ. Celui-ci pourrait être par ailleurs décliné, combiné, mais tout le monde fait la même chose avec plaisir. C'est d'ailleurs un moyen pour le D.J. de faire revenir le public. Toutes les petites chorégraphies qui passent par la télé, les lambadas, macarenas, etc., sont des minimums référents dans lesquels les gens se reconnaissent, s'acceptent, se rassurent. Toutes les danses « rétro » tango, cha-cha, qui ont été rejetées, sont de retour, tout le monde a envie de participer à tout style de moment musical dans le bal. Il y a aujourd'hui une réalité du plaisir de danser ensemble, en bal, sans avoir le sentiment d'être jugé.
À l'université, nos cours de rock par exemple fonctionnent très bien. Nous laissons la possibilité aux étudiants et personnels de venir avec leur conjoint, ou toute personne de leur choix, nous rapprochant d'une pratique sociale intergénérationnelle de bal. On obtient une dynamique forte, des cours très riches en figures chorégraphiques. En un an, les étudiants sont complètement autonomes, capables de danser le rock et de personnaliser des combinaisons. Tous les gens qui suivent ce cours se rendent ensemble dans des soirées rock. Cela donne du sens à leur pratique tout en visant des objectifs complexes.
Les cours de capoeira, de danse africaine fonctionnent aussi à plein et répondent certainement à cette envie de développer une danse personnalisée utilisable dans les bals. Nous ouvrons l'année prochaine un cours de salsa. À nous d'amener ensuite le projet de l'étudiant sur un intérêt plus complet vis-à-vis de l'art chorégraphique, mais le réinvestissement dans la pratique sociale immédiate qu'est le bal au sens large reste un moteur permanent et normal pour tout le monde.
Dans le bal en général, nous avons les mêmes enjeux que dans toute pratique chorégraphique : renforcer le conformisme médiatisé par la télévision d'aujourd'hui, ou bien ouvrir sur des pratiques culturelles de qualité. Une idée serait de compléter systématiquement les bals par la présentation de cultures musicales et dansées différentes, pouvant même donner lieu à un petit pas chorégraphique facile à danser. La demande sociale d'activités à la fois originales, festives, corporelles, dansées est gigantesque. À nous d'inventer les réponses favorisant la pérennité de notre riche patrimoine de danses traditionnelles et contemporaines.
Propos recueillis par J.B.
Contact
Université Lumière Lyon 2
Service des Affaires Culturelles
Classe Danse-études
Alexis Chvetzoff
Vice-président à la vie universitaire, culturelle
et sportive, chargé des campus.
[alexis.chvetzoff@univ-lyon2.fr->alexis.chvetzoff@univ-lyon2.fr]