Entretien avec Myriam Essayan et Yvan Dendievel du Bus Rouge.
CMTRA : Combien y a-t-il de personnes et d'instruments dans le bus à l'heure actuelle ?
Myriam Essayan : C'est exponentiel, mais pour le moment on est dix.
Yvan Dendievel : On est dix musiciens gravitant autour d'une couleur centrale, celle du hautbois du Languedoc et du graille, sorte de hautbois du sud encore plus sommaire, à la sonorité proche du cri de la corneille. Au-dessus planent les deux clarinettes et un piccolo. Suivent un trombone et puis deux sax sopranos.
M.E. : A cela s'ajoutent trois tambours, un tambour occitan basse, une caisse-claire et une darbouka.
Et comment s'est constituée la formation ?
M.E. : Au début, deux personnes lancent en Haute-Loire un projet musical et puis autour ça gravite, et puis ça se constitue et puis ça grouille et puis en 2000 le bus joue dehors pour la première fois devant des gens. Et depuis ça n'a cessé de se compléter, d'avancer.
Y.D. : Dès le départ, la pratique d'un répertoire précis, celui du hautbois du Languedoc a été débordée par une envie de jouer commune qui a permis de rassembler un trombone, des
morceaux du Massif Central, des sax sopranos qui ont travaillé d'abord dans les musiques improvisées...
M.E. : C'est une aventure de personnes qui investissent un terreau musical. A l'arrivée on est loin du bal. Il y a eu au départ un certain type de répertoire, et puis ça a bougé. Moi par exemple j'amène des percus afro-cubaines
là-dedans et voilà, ça prend, ça marche. On s'amuse.
Y.D. : En fait, il y a plusieurs strates en même temps. Sur la couche du hautbois du Languedoc, il y a la couche auvergnate. Ça a introduit une dimension géographique, une musique de plateau qui descend jusqu'au Languedoc et qui s'ouvre à d'autres cultures : il y a un sens géographique, une descente par l'A75 Clermont-Ferrand - Montpellier, l'Espagne et l'Atlantique, jusqu'à Cuba. Donc l'aventure est celle de personnes qui pratiquent ce voyage, on descend ensemble.
M.E. : Le propos de ce groupe, c'est de sortir du contexte musical habituel parce qu'on peut jouer sur une place de marché, le lendemain au milieu du Fin Gras du Mézenc, sur un plateau paumé devant des gens éberlués puis faire un concert sur une scène, se déguiser en vache en latex, aller jouer en Turquie... La musique c'est quelque chose qui voyage, qui bouge.
Mais quelles sont vos limites alors ?
Y.D. : Il y a une rigueur, un travail sur les rythmes, les phrasés et les tessitures. C'est un travail qui se veut respectueux du terreau de base. Après, ce terrain entre en dérive et là il commence à descendre et il s'en va. Il y a une cohérence de groupe, une logique qui s'installe.
Comment avancez-vous concrètement ? Comment travaillez-vous ?
Y.D. : En général un thème est joué quarante fois en fin de soirée par un ou deux membres du groupe jusqu'au moment ou les autres se greffent dessus. C'est au morceau de se trouver une notoriété dans le groupe. Et puis après il y a un gros travail d'improvisation et de lâcher-prise. On fixe ce qui nous plaît, et puis on continue à chercher. On fait des morceaux qui sont en création permanente. C'est un terrain de jeu.
Parlez-nous un peu de la Fédezic et de la friche RVI où vous êtes installés...
M.E. : La Fédezic est partie d'une idée toute bête, de réunir des groupes comme le Bus rouge, Kamenko, Azalaï, la Basse tonne, Musafari. On est autoproduits, indépendants, lyonnais, on joue tous dans deux ou trois groupes. Donc on a monté cette fédération de groupes où les gens ont choisi de ne pas être dans une démarche mercantile de leur musique. L'idée de la Fédezik est de fédérer nos énergies, par la constitution d'un catalogue commun. L'objectif est de trouver quelqu'un qui puisse diffuser ces outils-là et démarcher en commun, diffuser, monter des outils d'enregistrement, de production.
Y.D. : L'histoire de la Fédezic est complètement liée à la friche RVI, dans le troisième arrondissement de Lyon. C'est un lieu investi par des gens qui viennent d'horizons artistiques et culturels différents, qui se fédèrent et se prêtent leurs outils.
M.E. : Un premier événement de la Fédézic aura lieu du 11 au 15 avril au Croiseur (Scène sur Saône / Gerland) avec une programmation musicale tous les jours, du théâtre. L'idée est de présenter les groupes et le propos de la Fédézic.
Y.D. : Et puis en mai ou juin, à la friche, avec le collectif pour l'informatique libre Blouk Blouk, lui aussi installé à RVI, nous organisons une journée de réflexion sur la propriété intellectuelle des musiques. Au vu des possibilités actuelles de duplication, nous planchons sur la transmission libre des musiques, leur diffusion sur le web, le domaine public. La musique que joue le Bus Rouge est née du partage. À partir de quel moment la propriété empêche-t-elle cet échange ? Pourquoi soutenir la propriété plutôt que de soutenir la création ?
Propos recueillis par Y.E.
Retrouvez le Bus Rouge dans la [lettre n°60->article148]
Contact
Bus Rouge - Tél. 04 78 38 30 72 -
[busrouge@wanadoo.fr->busrouge@wanadoo.fr
www.busrouge.com
Musiciens :
Fanny Vialle (sax soprane), Léa Maquart (piccolo), Lorette Zitouni (trombonne), Myriam Essayan (percussions), Marion Chomier (sox soprane), Louis Cahu (hautbois du languedoc, graille), Fredédirc Couve (caisse claire), Xavier Blanchot (clarinette), Jorge Diaz (derbouka), Yvan Dendievel (clarinette).
Concerts :
2 avril festival du Fin Gras Avenue Laccasagne, Lyon (69)
9 avrilau carnaval de Saint-georges Annonay (07)
du 11 au 15 avrilFestival Fédezik au Croiseur (Scène-sur-Saône/Gerland) Lyon (69)