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Lettre d'information n°57. Printemps 2005 Kakarako

[Voir des extraits de la chorale de la Guillotière avec Viwanu Deboutoh->article1296]





Entretien avec Viwanu Deboutoh, chanteur et guitariste du groupe Kakarako. CMTRA : Peux-tu nous raconter ton histoire, ton parcours musical ?

Viwanu Deboutoh : C'est un long parcours. Je suis né au Togo, près de Lomé. Ça fait seize ans que je poursuis mon destin, que j'ai commencé, professionnellement. À cinq ans je faisais déjà de la percu et j'ai laissé les cours à l'âge de dix-huit ans. Après je suis parti du Togo pour aller m'installer à Londres, me perfectionner, voir d'autres choses, évoluer dans d'autres genres et élargir mon champ de compétences. Mon premier vrai instrument est la guitare après ça j'ai joué du clavier et de la batterie, à Lomé. Quel était ton environnement musical au Togo ?

Au Togo, il n'y a pas un style de musique en temps que tel, pour les Togolais. Il y a plein de musiques traditionnelles, mais ne sont pas travaillées, ni modernisées. Par contre il y a des musiques qui arrivent d'autres pays comme le alef du Ghana, le tchenk du Bénin ; au Nigeria, il y a l'afro-beat et le doudou music, au Cameroun le makossa. Chaque pays a son rythme, son style de musique mais au Togo, non. Alors moi, aujourd'hui je cherche une identité à cette tradition, à cette richesse que l'on a et dont on ne se sert pas. Tu t'inspires donc des musiques traditionnelles du Togo dans Kakarako ?

Oui, dans tout ce que je fais, je m'inspire de la musique traditionnelle togolaise. D'un type de musique togolaise en particulier ?

Oui, parce qu'il y en a plein. Au Togo il y a à peu près cinq millions d'habitants. Il y a quarante-quatre ethnies et chaque ethnie a sa langue et sa musique. Moi, je fais particulièrement la musique du nord. Je travaille le kamou qui est un type de musique qui se fait pour les moissons et pour les pêcheurs et les chasseurs. Ensuite je joue le apaja qui est la musique des pêcheurs et je joue aussi la musique des féticheurs. Comment est-ce que tu transformes les musiques dont tu t'inspires ? Comment est-ce que tu les fais évoluer ?

J'essaie de ne pas trop les moder-niser, pour garder leur richesse, mais je les adapte pour que ma musique soit ouverte et à la portée de beaucoup de monde. Si c'est trop pur, la musique ne peut pas traverser les frontières. Mais en élargissant un peu, chacun prend son petit truc dedans. La musique traditionnelle dont je m'inspire se fait uniquement avec les percussions, avec le kedim, le sogo, le pechi, le bassa, et puis la kibeou. Le bassa, que les gens ici appellent le dum, est une percussion du Togo ; c'est comme le sabar, mais pas comme le djembé. Il y a trois percussions du sud du Togo : il y a la petite, qui s'appelle kedim la moyenne s'appelle pechi et la grande, sogo. On utilise ces trois percussions, avec les maracas. Et puis la guitare kibeou, qui est une guitare à calebasse et à une corde. Le talking-drum aussi. Je garde la base et je rajoute la guitare acoustique, la basse, le clavier un peu, la batterie pour rythmer. Il y en a plein des musiques africaines mais c'est la couleur qui est importante. Mes morceaux sont des compositions sur des bases traditionnelles mais ils sont contemporains. En quelles langues chantes-tu et quels sont les thèmes que tu traites dans tes chansons ?

Je chante en mina, en kabia, en français et en anglais. Je parle de la vie quotidienne, de tout ce qui se passe dans le monde actuel, tout ce que j'ai vécu, tout ce que je ressens, la pauvreté, la maladie, la joie aussi. Je parle de tout ce que je vois quoi, tout ce qui me touche, mes espérances. Je chante des choses qui ont du sens, mes souffrances, mes galères, celles de mes amis, de ma famille, de la souffrance de l'Afrique en général. Pourquoi es-tu parti du Togo pour faire de la musique en Europe alors que là-bas tu avais une grande renommée ?

Je suis parti pour ma musique, pour évoluer, pour voir d'autres choses, pour continuer dans la musique, en pensant que ça allait être plus facile. Ici, il y a des moyens. Si tu veux vraiment le faire tu peux le faire. En Afrique, on a la volonté mais nos moyens sont limités. Moi j'ai bossé. Je suis arrivé à Londres, j'ai été à l'école. Je ne suis pas rentré dans la musique comme ça. J'ai eu pas mal d'expériences dans toutes sortes de musiques : du gospel, avec des Nigériens, des Sud-Africains zoulou. Je suis là à voir ce que je veux réellement avant de rentrer au studio pour sortir un truc définitif.Au Togo, j'ai beaucoup joué, j'étais un guitariste vraiment demandé. J'ai accompagné pas mal d'artistes : Myriam Makeba, j'ai fait la première partie d'Angélique Kidjo aussi, la première partie de Femi Kuti avec mon groupe, j'ai fait des voyages, des tournées avec des artistes de grande renommée. A part ça j'ai sorti mon album là-bas. Ça a marché. J'ai trouvé une maison qui a fait pas mal de promotion. J'ai vendu, j'ai fait des tournées, j'étais un peu célèbre là-bas.







Comment es-tu arrivé dans le gospel ? Est-ce une musique présente au Togo ?

L'Afrique est remplie d'églises. On nous a envahi là-bas ! Il y a les catholiques, les protestants. Moi je n'ai pas trop fait les églises à Lomé. J'en ai fréquenté une, l'Eglise du Christianisme Céleste, fondée au Nigeria. C'est une église vraiment spirituelle. Donc lorsque je suis arrivé à Londres, il n'y avait que des églises protestantes. Pour survivre, quand tu arrives en Europe, il y a toujours des problèmes. D'abord des galères de papiers, des problèmes de logement, tout ça, donc souvent c'est les églises qui aident les gens. Si t'as pas de papiers, t'as pas de boulot alors tu préfères aller prier Dieu en espérant trouver quelqu'un là-bas qui peut t'aider, parce que c'est là que tu peux connaître les gens vite fait, et les gens comme ils sont chrétiens ça passe bien. Les églises à Londres sont assez riches, il y a du matériel, des instruments, donc j'ai joué, j'ai été pris par une grande église, charismatique. J'ai passé deux ans dans la chorale, j'étais le choir master. Je faisais le clavier, la guitare, le chœur aussi. On faisait des concerts de gospel spirituel. Mais ce que j'aurais vraiment aimé faire, ce pourquoi je suis parti de Lomé, j'ai pas eu la chance de le faire là-bas à Londres. Parce qu'à Londres c'est un peu chaud de faire de la musique purement traditionnelle. C'est la musique pop en général, c'est le reggae, le ragga, le hip hop, le ragga dance world. Comme la majorité des « blacks » qui sont à Londres c'est des Jamaïcains, ils ont envahi le terrain avec le R'N B, les petits trucs comme ça. Donc je me suis dit la France c'est à côté, la France aussi c'est la capitale de la musique africaine. Il y a pas mal d'artistes qui sont passés par Paris. Dans toute la France, d'abord il y a un public pour la musique africaine. Il y a aussi des concurrents sur le terrain, il y a d'autres groupes africains, qui font de la musique traditionnelle. Tu as monté Kakarako il y a combien de temps ?

Je l'ai monté début 2004. On a commencé à répéter une fois par semaine, on faisait des petits concerts. On a commencé à quatre personnes, d'abord avec Chouchou, le bassiste, Manu, le batteur, avec Baba Touré, qui est percussionniste, on a travaillé avec cette formation. Moi je faisais guitare, chant et kibeou. Un clavier, qui s'appelle Vicente Fritis, s'est rajouté . Et sur le disque il y a des invités, il y a des chœurs...

Oui sur le disque il y a Isabelle, avec qui j'ai travaillé. J'avais commencé un boulot à Londres que je n'avais pas pu terminer avant de venir ici donc je l'ai appelée pour qu'elle fasse le chœur avec moi. J'ai trouvé qu'elle avait une belle voix et je l'ai invité à participer à la démo. Il y avait Apoloss aussi, un chanteur et percussionniste ivoirien, qui a fait les congas dans un morceau. Il y avait deux amis, un qui a fait le bendir et l'autre la flûte orientale. Ça fait un grand métissage culturel !

Oui. En plus, dans le groupe, Chouchou est camerounais, le percussionniste est sénégalais, le batteur c'est un Français et Vicente c'est un Chilien, donc c'est un mélange de cultures. Que veut dire « Kakarako » ?

Kakarako c'est le fétiche dans lequel je suis né. J'ai perdu mes parents à l'âge de neuf ans donc j'ai grandi avec ma grand-mère d'abord, et puis un ami de mon papa. Mon papa c'était un militaire. Cet ami de mon père est un féticheur-guérisseur et il possède Kakarako. C'est un fétiche guerrier, une force divine, ça te donne une croyance terrible. C'est un animal, une sorte de vautour qui a disparu au Togo pendant des décennies et qui a été retrouvé par mon père dans la brousse. Il allait chercher des herbes pour guérir les malades et il a trouvé la trace de cet animal-là. Il a appelé ses amis, ils ont poursuivi l'animal, ils l'ont eu et ils l'ont ramené à la maison, croyant le guérir. Il a passé deux semaines avant de mourir. Ils se sont servis de son corps pour fabriquer un fétiche, qui a prit le nom Kakarako. Toute ma souffrance a été guérie, tout mon espoir je l'ai eu à travers Kakarako. C'est pourquoi j'ai nommé le groupe Kakarako. Il y a un langage qui dit « qui ne risque rien n'a rien » donc si tu risques, tu vas avoir. Dans le groupe Kakarako, c'est la voix qu'on a choisi, celle des gens qui croient à ce qu'ils ne voient pas. Le fétiche c'est un autre sens que celui de l'homme. Il y a des forces dans cette nature, que ce soit la force de Dieu ou une autre. Les Indiens utilisent d'autres forces, mais c'est le même dieu. Donc un fétiche c'est ça, c'est l'autre sens de la personne, de notre personnalité. Quelles sont les perspectives du groupe à court et à long terme ?

Le 2 avril on joue en Ardèche, le 15 à l'Auditorium de Lyon pour la Nuit Africaine, avec Manu Dibango et le 16 on est à la cave à Musique, à Mâcon en première partie de Tinariwen. On est en train de préparer une tournée en été. On va aller en Espagne, en Suisse, en Allemagne, à Londres, pour des festivals. En France aussi. Et après la tournée, l'album va sortir. On va entrer au studio d'ici la fin de l'année pour l'album de Kakarako. Propos recueillis par Y.E. Contact

V. Deboutoh au 00 33 (0)6 70 43 39 70

contact@kakarako.com [Site internet de Kakarako->http://www.kakarako.com/] Concerts 15 avril Nuit Africaine Auditorium de Lyon (69)

16 avril Cave à Musique à Mâcon (71)


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