Quand le bois parle
CMTRA : Une fête du balafon dans
la Drôme ?
Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?
Oui, nous organisons cette année à la
Pentecôte une rencontre de trois jours
entre balafonistes. Ce rendez-vous
aura lieu au sîte de la Colombe à Aurel
en Drôme.
Cette rencontre est née du constat que
beaucoup de balafonistes européens
que nous avons rencontrés, se sentent
seuls dans leur « découverte », ignorant
le voisin qui vit une démarche similaire.
Chaque musicien a un pays ou
une « ethnie » de référence et les
musiques jouées sont fortement imprégnées
de ces sources. Une rencontre de
musiciens européens jouant du balafon
forme en quelque sorte un miroir de
la diversité et de la richesse bala-musicale
en Afrique.
Une première rencontre de ce genre
avait eu lieu 2004 à Comps/Drôme.
Ensuite les rencontres se sont tenues
2005, 2006 et 2007 en Suisse pour
revenir cette année en France.
Quel type de programmation proposez-
vous ? Quels sont vos publics ?
Le samedi 10 mai, notre rassemblement
de balafonistes ouvrira les portes
au public pour une fête sous chapiteau
qui commencera avec un apéro balafon.
A la suite, il y aura la projection
d’un film sur la rencontre avec des
musiciens au Mali. S’enchaîneront les
différentes groupes ou formations de
la rencontre balafon avec comme fil
rouge l’envie de (re)donner au balafon
la place qu’il mérite dans la musique
africaine et européenne. Cette soirée
est une invitation à la découverte, au
partage, à l'échange... à la danse!!!
« Balafon » est devenu un terme générique
pour désigner le xylophone à
résonateurs africain – qu’il soit
accordé en gamme pentatonique ou en
gamme heptatonique. Même en
Afrique, ce terme est très répandu,
malgré les appellations spécifiques
que chaque population a donné à cet
instrument avec des tailles et des
formes très variées. Bala veut dire : le
bois sonore, le bois qui parle (en
Malinké). Fo est l’homme qui peut
faire sonner le bala et balafola est le
maître en la matière. Sous ses mains le
bala commence à parler…
Quelles sont les utilisations traditionnelles
de cet instrument ?
Comment évolue t-il aujourd'hui ?
En effet, la musique de balafon est
populaire dans de nombreux pays
d'Afrique, et dans chaque pays plusieurs
types de balafons et plusieurs
manières de les jouer existent. Au village,
le balafon accompagne étroitement
la vie quotidienne et se joue aussi
bien dans des cérémonies et rituels traditionnels,
de la naissance, en passant
par les rites de passages, les mariages,
les enterrements, les funérailles, pendant
les fêtes agraires et saisonniers, et
pour accompagner les travaux des
champs. A part ces moments de vie
plutôt sacrés, il est très apprécié pour
des fêtes de réjouissance. Le balafon
avait également la fonction de transmettre
des messages.
En ville, le balafon est essentiellement
joué au cabaret, espace de rencontre de
danse et de communication autour
d’une bière artisanale...
Aujourd’hui la musique tend vers la
virtuosité et la vitesse, avec le risque
de perdre la profondeur et l’ancrage
dans une culture ancestrale. Comme le
jeu du balafon demande un certain
effort physique tout en restant souple,
de même que les danses correspondantes,
on pourrait dire que le balafon
unit corps, esprit et âme.
En Europe, le jeu du balafon nous
offre des possibilités fabuleuses dans
le cadre de la pédagogie musicale, la
musicothérapie, le développement
personnel et social. Le balafon est un
médiateur important dans l’échange
culturel.
Ce festival d'un week-end trouve
t-il des prolongements le reste de
l'année ?
De nombreuses initiatives ont vu le
jour ces dernières années en France,
Allemagne, Suisse, Belgique, Autriche,
Angleterre, Pays-Bas autour du balafon.
Beaucoup d'artistes africains
vivant en Europe transmettent leur
savoir et font vivre et chanter le balafon
autour d'eux. Pour préparer cette rencontre
nous avons organisé toute une
série de concerts et manifestations en
2007. Nous espérons pouvoir continuer
à tisser les liens entre musiciens.
Y'a t'il un terreau propice pour cet
instrument en Drôme ?
Pas plus que dans d’autres départements
ou pays. Les gens intéressés
sont partout. En ce qui concerne la
Drôme et l’Ardèche, les artistes africains
de passage ou en résidence sont
nombreux. Chacun rayonne autour de
lui et donne goût au jeu et à la danse.
En ce qui nous concerne, en tant qu’organisateurs,
Franck est un adepte du
balafon depuis longtemps, il a voyagé
plusieurs fois au Burkina Faso, tissé
des liens avec des musiciens du pays
et commence a bien pouvoir faire parler
son balafon. Moi-même, je me sens
plus luthier et artisan. Pendant vingt
ans j’ai fabriqué des xylophones et
depuis 2000, je me suis lancé dans une
vaste quête en cherchant tout document
et renseignement relatifs à cet
instrument. Il en est née une exposition
sur les xylophones en Afrique et
Amérique Centrale, avec des photos
actuelles et d’archives ainsi qu’une
collection d’une dizaine d’instruments
originaux des deux continents. Cette
exposition peut être louée pour servir
comme toile de fond lors d’une manifestation,
d’un concert, d’une rencontre,
d’un symposium ou congrès
ayant comme thème aussi bien l’ethnomusicologie
que le langage.
Propos recueillis par P.B.