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Enseignement et recherche en ethnomusicologie
Journées d'études : 4, 5 et 6 juin, Villié-Morgon (69)

Nathalie Fernando-Marandola, ethnomusicologue, Maître de Conférences à l'Université Jean Monnet (Saint-Étienne), présidente de la Société Française d'Ethnomusicologie, qui organise les Journées d'Études sur le thème enseignement et recherche en ethnomusicologie les 4, 5, et 6 juin à Villié-Morgon (69). CMTRA : Nathalie Fernando, vous présidez la Société Française d'Ethnomusicologie. Quelle est à votre sens en 2004, la définition de cette discipline ?

Nathalie Fernando : la discipline porte cette appellation depuis les années 1950. Auparavant, on parlait de musicologie comparée, ou d'anthropologie musicale. La première définition qui me vient à l'esprit, c'est “l'étude des musiques traditionnelles du monde”, sans exception. Sans doute cette étude a-t-elle une particularité, dans la mesure où l'on se focalise essentiellement sur les musiques de tradition orale.

Dans “ethnomusicologie”, tout le monde remarque qu'il y a “ethno” d'un côté, et “musicologie” de l'autre. Certains considèrent que l'ethnomusicologie fait partie de l'ethnologie, d'autres estiment que la discipline fait partie de la musicologie. C'est un débat sans fin, mais là n'est pas l'intérêt. L'ethnomusicologie n'est pas, à mes yeux, une discipline hybride entre “ethno” et “musicologie” ; pour moi, le préfixe “ethno” renvoie à “l'Autre”. Il s'agit donc de s'intéresser à la musique de l'Autre. Par ailleurs, l'ethnomusicologie a su définir ses objets d'étude, et a su mettre au point des méthodes de recherche qui lui sont propres.

En réalité, l'ethnomusicologie touche à divers domaines de recherche que sont l'ethnologie, c'est-à-dire l'étude du contexte au sein duquel la musique prend place, la musicologie, parce que l'on étudie les procédés d'élaboration du langage musical - sa grammaire et ses structures - l'organologie, avec la description des instruments de musique, la linguistique afin de noter et traduire le vocabulaire musical et les paroles des chants, l'esthétique, c'est-à-dire la prise en compte des préférences formelles à titre individuel ou collectif, mais aussi la sémantique, puisque tout fait musical produit du sens ; et tout ceci, dans une perspective anthropologique, dans la mesure où se pose inévitablement, à mon sens, la question des universaux.

Enfin, un autre domaine de recherche devient de plus en plus important pour notre discipline, celui des sciences cognitives : quand on travaille sur les musiques de tradition orale, bien souvent, la théorie musicale n'est pas verbalisée, elle n'est pas explicite. On aura besoin de méthodes issues de la psychologie expérimentale pour parvenir à comprendre comment les gens pensent leur système musical, comment ils l'organisent, comment ils le conçoivent.

Comme dans beaucoup d'autres disciplines des sciences humaines, l'ethnomusicologue a donc affaire à de nombreux domaines, sans pour autant être spécialiste de tous, évidemment.

Je n'oublie pas les personnes qui optent pour une approche pratique des musiques traditionnelles à travers l'apprentissage du répertoire. Leur démarche est aussi louable que l'approche plus théorique, plus scientifique du chercheur. Si la plupart de ces personnes savent combiner les deux démarches, d'autres seraient sans doute intéressées par l'acquisition des outils d'analyse et d'enquête mis en œuvre par les chercheurs afin de faciliter leur travail sur le terrain et de compléter leurs connaissances. L'ethnomusicologie s'est construite sur l'étude des musiques de sociétés exotiques et lointaines, dont on peut penser qu'elles ont, ou avaient une certaine cohérence, une stabilité. L'ethnomusicologie peut-elle intervenir sur les musiques de nos sociétés marquées par la multiculturalité et d'éventuels métissages ?

Je ne poserais pas la question en ces termes, qui laissent penser que les phénomènes d'acculturation, de métissage, sont des phénomènes récents. On n'a jamais eu affaire à des cultures “pures”. Les cultures qui pouvaient être imaginées comme telles à une certaine époque se révélaient, au fil des découvertes, être le résultat d'acculturations antérieures au moment de leur prise en compte par l'ethnomusicologie occidentale. Les cultures sont en mouvement, en évolution permanente, elles vivent en interaction les unes avec les autres.

Si chacune parvient à se singulariser par rapport à la “culture d'à côté”, c'est parce qu'elle sait maintenir l'équilibre de cette interaction. En fait, nous avons toujours eu affaire à des cultures issues d'une forme de métissage, d'acculturation, de transformation.

Aujourd'hui, on étudie de plus en plus les musiques de l'immigration qui font désormais partie du champ de l'ethnomusicologie. Si le contexte est quelque peu différent, la méthode d'investigation mise en œuvre par l'ethnomusicologue ne l'est pas. À quoi l'ethnomusicologie peut-elle être utile dans notre société ?

Cette question est très sérieuse, parce qu'on a du mal, nous, ethnomusicologues, à valoriser notre objet de recherche. Pourquoi ? Parce que l'on a tendance à mettre d'abord en avant l'aspect rigoureux et indispensable de la démarche scientifique, on valorise le travail de fond qui a été fait en ce sens, les aspects théoriques et l'on oublie de parler des apports plus pragmatiques de cette discipline.

Le fait, par exemple, de pouvoir développer l'enseignement de ces musiques auprès des enfants scolarisés, des IUFM, des CEFEDEM et des institutions de ce type, est capital. Il y a un nombre considérable de gens qui ignorent tout de la musique des centaines de cultures différentes présentes sur notre terre. Nous ne parlons pas que de musique quand on parle d'ethnomusicologie, nous parlons de la musique dans son contexte, nous donnons par là des clés indispensables pour comprendre les comportements culturels et sociaux et apprendre à aborder les différences. Quelles sont les activités de la SFE ?

La SFE existe depuis les années 1980. C'est une jeune société d'une centaine de membres, des chercheurs, des enseignants, issus du monde universitaire, mais aussi de l'enseignement secondaire, ou qui s'intéressent à l'enseignement des musiques traditionnelles, donc également des enseignants en conservatoire, et des journalistes spécialisés, des producteurs, tous en lien avec le domaine des musiques traditionnelles.

C'est une société dite “savante”, ce qui veut dire que pour y entrer, il faut faire état d'études équivalentes d'un niveau master deuxième année, (ex-DEA), ou alors faire preuve d'une certaine carrière et d'un niveau de connaissances suffisants dans la discipline. Pour en savoir plus, le plus simple est de consulter notre site Internet.

La SFE a quatre objectifs principaux:

D'abord, soutenir la recherche. Grâce à un système de bourses, nous aidons financièrement les jeunes chercheurs à accéder à leur terrain. Sans terrain de recherche, pas de professionnalisation, pas de diplôme ni de reconnaissance possible. Ensuite, on essaie de favoriser les rencontres entre les chercheurs, en finançant leur participation à des colloques nationaux et internationaux, ou en invitant des chercheurs étrangers. Enfin, nous organisons deux colloques par an : une “Journée d'automne”, en novembre, et des “Journées d'études” de trois jours, qui ont lieu cette année les 4, 5 et 6 juin, à Villié-Morgon. Le premier colloque est plutôt interne à la société, nous y convions généralement un invité extérieur, et travaillons tous de la façon la plus interactive possible sur le même thème. C'est en fait une journée de recherche entre les membres, les étudiants et les invités. Par contre, les “Journées d'étude” sont beaucoup plus ouvertes, en forme de colloque national et international, avec un sujet qui va nous occuper pendant trois jours. Cette année, nous allons travailler sur “enseignement et recherche en ethnomusicologie”.

Le deuxième axe de la SFE, c'est la formation, d'où le choix du thème des Journées d'Etude de cette année. Les membres de notre association interviennent assez régulièrement dans différentes structures universitaires, et dans des cursus d'enseignement comme les CEFEDEM, les CFMI, les IUFM, pour des conférences ponctuelles ou régulières.

Le troisième aspect c'est l'archivage et la consultation.

Nous essayons de faire en sorte que les enregistrements que l'on fait sur le terrain soient disponibles pour les cultures au sein desquelles on les a réalisés. La politique de retour aux cultures d'origine, qui consiste à monter des programmes d'archivages, de stockage et de consultation dans les pays-mêmes dans lesquels on travaille pose de nombreuses difficultés. Nous y travaillons. Le dernier axe, c'est la publication. Nous aidons les chercheurs, les étudiants à publier leurs travaux. Nous participons pour ça à la collection “Homme et musique”, qui sort un livre tous les ans ou tous les deux ans, fruit des travaux de chercheurs, et au bilan du film ethnographique, qui a lieu tous les ans au Musée de l'Homme, en attribuant le prix Bartok au meilleur film portant sur la musique. Nous aidons également des publications ponctuelles d'autres ouvrages, de CD ou encore de DVD.

Pour réaliser toutes ses actions, la SFE est subventionnée par la Direction de la Musique, de la Danse, du Théâtre et des Spectacles du Ministère de la Culture. Pouvez-vous détailler le thème des Journées d'Étude 2004 ?

Dans la thématique choisie, “enseignement et recherche en ethnomusicologie”, trois points essentiels nous intéressent : comment accueillir des étudiants dans des laboratoires de recherche ? comment adapter la maquette de nos enseignements à la réforme LMD*, et en profiter pour revoir les contenus, pour créer des réseaux de relations entre chercheurs et enseignants, pour que les étudiants trouvent le meilleur interlocuteur, même au niveau international ? Que vont devenir les jeunes chercheurs que l'on forme, quel avenir ont-ils ? Y a-t-il de nouveaux métiers à créer dans ce domaine, de nouveaux enjeux qui vont faire évoluer le métier ? Enfin, comment décloisonner notre discipline ? Que pouvons-nous faire avec les institutions et collectivités locales ? Que pouvons-nous faire avec l'enseignement artistique spécialisé, les conservatoires, les centres de recherche régionaux, tous partenaires potentiels dont nous sommes coupés ? Qui peut accéder aux Journées d'Étude ?

Il y a deux possibilités. Soit on souhaite assister simplement aux débats, et c'est ouvert à tous, dans la mesure où chaque personne signale sa venue auprès de notre secrétariat, les places étant limitées ; soit on propose une communication, et il faut, de la même façon, écrire à la SFE pour faire une description résumée du projet de communication. Nous pouvons alors évaluer à quelle étape du débat cette proposition peut s'inscrire, organiser la construction générale des échanges dans le temps dont nous disposons. *réforme LMD : réforme licence, master, doctorat dans le cadre de l'harmonisation européenne des diplômes universitaires. Propos recueillis par J.B. Contact

Société Française d'Ethnomusicologie

17 Place du Trocadéro 75116 Paris

Tél./Fax 01 44 05 57 73

[ethnomusicologie@free.fr ->ethnomusicologie@free.fr]

[http://ethnomusicologie.free.fr/->http://ethnomusicologie.free.fr/]


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