17. Ça-i, collectif d'artistes
Entretien avec Jean Michel Fragey du Collectif Ça-i.
CMTRA : Pourquoi avoir créer le collectif Ça-I ?
Le choix d’utiliser le terme de collectif ne correspond
pas à une mode mais bien à une réalité
de fonctionnement. Le Collectif ça-i répond
d’abord à la nécessité pour des artistes d’être
acteurs de leur diffusion, ils ne « livrent » pas, clé en
main, leurs créations à un diffuseur, ce sont eux
les créateurs de la structure, ce qui leur donne
libre choix des orientations à prendre. C’est sur
ces bases que le collectif développe son projet
artistique : partir de racines communes (ancrage
territorial) pour aller vers des ramifications
diverses (mutualisation des savoirs faire) afin
de construire une identité artistique forte et
pérenne.
Pour le collectif ça-i, nous distinguons deux
zones distinctes correspondant à deux façons de
se diffuser. Sur un plan national et international,
diffuser ses œuvres, c’est avant tout faire
connaître sa culture, l’amener à se frotter à
d’autres cultures et arriver à trouver un sens commun
entre la création proposée et la politique de
programmation du lieu d’accueil. Sur l’échelle
de son territoire (pour nous l’Aquitaine), c’est
d’apporter un « devenir » à une tradition populaire,
de s’oser à des expérimentations en collaboration
avec nos partenaires institutionnels et
enfin, d’être simplement un acteur du tissu culturel
local, à échelle humaine, en s’écartant des
logiques de rentabilité.
Quels sont vos modes d’organisation dans ce
domaine ?
Nous pratiquons de plus en plus une politique
complémentaire de résidence / diffusion. Nous
entendons par là le fait de poser nos valises sur
un territoire et d’étudier avec les acteurs locaux
de quelle façon notre
démarche peut être complémentaire
et donc enrichir la
culture du territoire que nous
explorons. Nous le faisons par
exemple avec la Familha Artús, d’abord sur
l’Aquitaine avec l’OARA (office artistique de la
région aquitaine) et musiques de nuits (chargé de
la diffusion après la résidence), mais aussi en
région PACAet en Bretagne (projet 2008/2009),
où même en Autriche (résidence commencée,
diffusion en 2008/2009). Il est évident que nous
ne pouvons pas nous baser essentiellement sur ce
système de diffusion, nous répondons aussi à des
contraintes économiques, qui nous obligent à
répondre à la demande sans forcément de stratégie
de diffusion durable.
Mise à part ces actions isolées, nous avons
récemment monté une Coordination Occitane
Musicale avec 4 autres agences du sud de la
France (Trois Quatre ! à Bordeaux, Org & Com
à Toulouse, Sirventès à Aurillac et Mic Mac à
Marseille). Ils nous semble essentiel de se fédérer
entre professionnels du secteur. Nous avons
la particularité de travailler sur un segment artistique
bien précis (musiques occitanes). Cette
coordination a pour objectif de rendre plus
visible les groupes respectifs de chaque agence
(plate-forme de communication Internet, stand
commun dans les salons, attaché
de presse mutualisé…),
c’est aussi un outil de professionnalisation
pour les jeunes
artistes et d’interface auprès
des instances régionales qui, elles aussi,
travaillent de plus en plus en inter région.
Quelles difficultés rencontrez vous ?
A mon avis, les freins arrivent plus de la part des
artistes que des programmateurs. Je veux dire par
là que si le propos artistique est assumé sans
complexe, dans ce cas le chargé de diffusion aura
bien plus de facilité à le transmettre au programmateur
et pourra ainsi passer à la deuxième étape
: le sens commun. Nous avons nous-même
observé cette tendance avec certains des groupes
que nous diffusons. D’autres part, le fameux
débat de la légitimité de la place des musiques
traditionnelles au sein des musiques actuelles est
stérile, nous sommes tous dans le même bateau
et donc le même combat. Il est évident qu’un
programmateur de SMAC ne sera pas intéressé
par un bal gascon. Par contre, après un long travail
de sensibilisation auprès de ce programmateur, et
parce que vous avez une légitimité sur le plan
local, le sens commun sera trouvé. Si tous les
acteurs des musiques traditionnelles mènent ce
travail auprès de leurs structures ou de leurs
SMAC respectives, c’est autant de portes
ouvertes pour les autres…
Propos recuellis par Jean Sébastien Esnault