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20. Le Nouveau Pavillon, une expérience artistique
Par Sylvain Girault, directeur du Nouveau Pavillon

Pour saisir ce qui fait la singularité de ce projet, il me semble nécessaire de resituer les trois expériences qui, se croisant, ont donné lieu à sa création.

Premier élément : le lien à l'association Dastum 44. De 1997 à 2002, j'ai présidé l'association Dastum 44 – centre des traditions orales en Loire-Atlantique. C'est une association du réseau Dastum (mais indépendante juridiquement de Dastum Bretagne) qui s'est donnée pour mission le collectage, la sauvegarde et la transmission de la culture populaire de tradition orale du département de Loire-Atlantique. Pendant cette période, Dastum 44 s'est distingué pour avoir été la seule antenne du réseau à s'intéresser au patrimoine urbain (publication en 1998 de Nantes en chansons puis en 2001 de Saint-Nazaire en chansons) et à développer un secteur d'activités « diffusion ». Celui-ci avait pris la forme de partenariats avec les centres culturels des agglo nantaise et nazairienne et d'une soirée La Grande Veillée alternant les spectacles grande jauge et les petites formes proches de la veillée.

Deuxième élément : mon parcours artistique. Al'origine sonneur de violon, je me suis intéressé à la pratique du chant traditionnel de haute Bretagne. Passionné, j'ai beaucoup écouté, me suis beaucoup imprégné, ait fait un peu de collectage. En 1999, j'ai intégré le groupe professionnel Katé-Mé, qui mêle les pratiques traditionnelles du chant de haute Bretagne (francophone donc) et de la musique de couple biniou-bombarde à une orchestration, des influences et des langages issus du rock, du funk et du hip-hop. Cette expérience d'artiste professionnel se frottant aux exigences et à la rigueur de la scène et de la création est l'autre élément principal du contexte de création du Nouveau Pavillon. J'ai alors compris les difficultés de création pour les artistes issus de ces musiques, mais aussi les difficultés de reconnaissance, de crédibilité, d'intégration de réseaux de diffusion normalisés.

Troisième élément : mon expérience d'agent territorial. De 1997 à 2007, j'ai été agent territorial (attaché). Ma première expérience à la mairie de Bouguenais de 1997 à 2001 m'a permis de tisser des liens professionnels qui ont sans doute facilité et accéléré l'installation du projet sur cette commune par la suite. Mon crédit professionnel auprès des élus et l'expérience de la Grande Veillée à Bouguenais ont été des éléments forts. Ensuite, de 2001 à 2007, j'ai été chargé de mission à la Direction de la culture de la Ville de Saint-Nazaire. Là encore, ma connaissance des réseaux locaux de la culture, de l'économie et des règles en pratique dans le secteur du spectacle vivant ont certainement facilité la mise en place d'un tel projet.

La singularité du Nouveau Pavillon est avant tout celle-là : c'est un projet personnel, à la fois d'un artiste, d'un militant et d'un « cultureux », mais aussi un projet né d'une expérience et d'une aventure collective au sein de Dastum 44. En signe de reconnaissance du travail de La Grande Veillée, la DRAC Pays de la Loire me suggère en 2002 de réfléchir à un projet pérenne de structure dédiée à la création et la diffusion des artistes professionnels de musiques traditionnelles. Ce projet je l'avais déjà en tête, il fut écrit le soir même. Ensuite, durant quelques mois, il fut l'objet de nombreux échanges entre la DRAC, « Musiques et Danses en Loire- Atlantique » et les militants de Dastum 44 qui étaient engagés dans les actions de diffusion. Une fois le projet rédigé sur le papier, il fallait un lieu pour lui permettre d'exister. Ce fut la salle de spectacles du centre Marcet, sis dans le quartier des Couëts à Bouguenais au Sud-Ouest de l'agglomération nantaise. Le Maire et les élus cherchaient un projet culturel fort pour requalifier ce qui fut de 1981 au début des années 90 la salle de spectacles municipale (de l'été 2008 à l'été 2009, la Ville de Bouguenais entamera d'ailleurs dans ce lieu des travaux d'isolation thermique et acoustique, d'agrandissement de la jauge de 170 à 220 places et de création de nos bureaux et d'un espace d'accueil du public).

Nous sommes donc en 2003. Nous créons une association indépendante dans laquelle Dastum 44 est représentée. La subvention de la DRAC pour démarrer l'année 2004 est de 15 000 euros. La Ville s'engage sur un rééquipement de la salle, la mise à disposition de moyens (salle, technicien lumières, bureau, communication) et une subvention de 7 000 euros.

Aujourd'hui la situation est la suivante : 15 concerts par saison d'octobre à mai, une résidence de création initiée et produite, un budget de 200 000 euros, un soutien financier de la Ville, du Département, de la DRAC et de la Région, un conventionnement 2006-2007-2008 de développement avec la DRAC et la Ville, un poste de direction et un poste de secrétaire de direction, une équipe de 12 bénévoles sur l'accueil du public et des artistes les soirs de concerts. La structure reste assez modeste par la taille, en comparaison avec ses voisines du secteur des musiques actuelles.

Alors pourquoi un tel projet est né ici et pas ailleurs en France ? Peut-être d'abord parce que d'autres ne l'ont pas proposé ailleurs. Ensuite, parce qu'ici il nous a été facile de montrer que les musiques amplifiées avaient leur lieu (Olympic), les musiques improvisées et jazz aussi (Pannonica), la chanson aussi (Bouche d'air) mais pas les musiques traditionnelles. Alors même qu'elles représentent un très grand nombre de musiciens amateurs et un nombre important de professionnels dans le Nord-Ouest de la France.

Proposer un tel projet c'était aussi pointer une injustice et faire entrer un secteur mal compris et parfois craint par certains élus dans un cadre normalisé.

Aujourd'hui, quatre ans après sa création, Le Nouveau Pavillon est bien repéré dans le paysage culturel local, à la fois parce qu'il défend un secteur musical estimé « pointu » ou « spécialisé » mais aussi parce qu'il défend une ligne et une empreinte artistique particulières et repérables. Il est d'ailleurs l'une des rares scènes dans ce cas dans l'agglomération nantaise, beaucoup se contentant d'une large polyvalence sans épaisseur artistique. Il ne s'agit pas pour nous de diffuser tout ce qui se fait dans ce domaine. Nous défendons des choix, une conception artistique et culturelle, un projet de fond qui a longuement réfléchi puis validé par nos financeurs. La ligne artistique pourrait se résumer ainsi : s'intéresser aux artistes autant qu'à leurs oeuvres, aux itinéraires, autant qu'aux « produits finis », appréhender ces musiques dans une démarche diachronique avant tout. Les artistes « Nouveau Pavillon » ont tous en commun une maîtrise de leur langage artistique, un ancrage fort dans une tradition musicale (ex. : la tradition du chant de haute Bretagne, du hardingfele norvégien, etc) entendue comme un langage à maîtriser plus que comme un carcan dans lequel rester enfermé. C'est la marque « Dastum 44 », le lien au collectage, à l'imprégnation. On n'écrit pas un roman en espagnol sans connaître parfaitement l'espagnol... Cela a à voir avec la maîtrise d'un langage à la fois artistique donc très personnel, et collectif, communautaire, social.

Ensuite, les artistes « Nouveau Pavillon » ont tous en commun la volonté de créer, de monter sur une scène, de s'affranchir des codes de la session, du bal, de la veillée, pour intégrer ceux de la création scénique professionnelle.

Ils ont aussi pour la plupart l'envie de « dépasser les bornes », d'explorer de nouveaux territoires artistiques, de croiser, d'aller à la rencontre d'autres formes artistiques ou musicales. La volonté d'inscrire leur expression dans le monde dans lequel ils vivent. Comme tout artiste finalement...

On remarquera que sont bannis de nos vocabulaires les mots authenticité, respect ou identité régionale ou nationale. C'est d'ailleurs la raison principale pour laquelle les collectivités publiques nous ont suivis. Authenticité ? Une illusion morbide. Respect ? Un artiste digne de ce nom passe son temps à ne pas respecter (cela ne veut pas dire qu'il ne « connaît » pas). Identité régionale ? Un artiste exprime ce qu'il est, il ne revendique pas. Les musiciens traditionnels n'ont pas vocation à être des porte-drapeaux. Il est urgent de se sortir de ces enfermements, de ces instrumentalisations et au final, de ces folklorisations successives... Ce discours semble peut-être évident au CMTRA, il ne l'est pas toujours en Bretagne...

Notre projet culturel consiste à devenir un pont entre le grand public et les artistes de ces musiques. Etre un lieu spécialisé n'est pas être un club d'afficionados. C'est être un aiguillon, un initiateur, un médiateur avec les publics éloignés de ces musiques, avec les diffuseurs éloignés de ces musiques, avec les autres secteurs artistiques. Avoir une politique tarifaire attractive à 14 euros la place et 10 pour le tarif abonné (à partir de 3 concerts) et réduit. Mener de nombreuses actions de médiation culturelle avec les écoles de musiques institutionnelles et associatives du département, les écoles primaires de la ville, les associations sociales et culturelles locales. Inscrire le Nouveau Pavillon dans le réseau dans le secteur des musiques actuelles et plus largement dans un réseau de partenariats avec d'autres structures culturelles. Devenir un lieu ressources sur la région pour les programmateurs, artistes, élus... Soutenir les artistes professionnels de la région et contribuer à créer un structurer un vrai réseau de compagnies et de collectifs d'artistes sur le territoire régional.

Voilà en quelques mots évidemment trop résumés l'expérience, l'aventure, l'exigence de ce projet qui ne prétend pas être un modèle à calquer, mais qui espère avoir des petits frères ailleurs, bientôt !



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