DASTUM
Mille métiers : Les métiers dans le chant traditionnel
Il y eut un temps … où les gens chantaient
en travaillant. Ils chantaient
pour guider les vaches, pour rivaliser
d’ardeur entre faucheurs, pour hisser
une voile, pour accompagner les
gestes domestiques. Ils chantaient en
dansant pour tasser les sols et battre les
moissons ...
Naviguer à l’intérieur des chants traditionnels
sous l’angle des métiers est
un voyage plein d’enseignements.
Dastum (CMT Bretagne) publie ici un
florilège inattendu de chants liés aux
métiers ou aux multiples activités de
l'ancienne civilisation rurale et maritime
bretonne : des artisans (meuniers,
tailleurs) aux gens de la forêt (scieurs
de long, charbonniers) en passant par
les petits métiers itinérants, ou des
chants de travail des marins au long
cours aux houpperies et bahoteries des
paysans, sans oublier les travaux des
femmes à la ferme.
Le premier disque aborde la plupart
des chants dits « de travail » ou
« accompagnant » un travail. Dans le
second disque, on y retrouvera davantage
les chansons « sur les métiers ».
Ce document est d’abord un témoignage
précis et chargé d’histoires sur
les métiers et les liens sociaux qui
régissaient cette ancienne société
rurale. D’autre part, il dissèque la
notion de fonctionnalité dans le chant
et analyse la manière dont un geste, le
rythme d’une tâche façonne le chant et
le fait évoluer. Enfin, ces trop rares
témoignages sonores nous laisse pantois
quant aux timbres, à l’expressivité
narrative et à la variété des formes utilisées.
Transcriptions et traductions
sont là pour inciter à la reprise et au
renouvellement de ces chants. Voilà
une belle matière dont il faut se saisir.
Bravo pour document d’une grande
érudition, on a rarement approche plus
passionnante et documentée du patrimoine
chanté.
2 CD + livret 164 p. / 26 euros
DZOUGA
Fatcha peta lou peis
Violons des Monts d'Auvergne
Cela fait longtemps que nous n’avions
eu dans les mains une publication
explorant les musiques des violoneux
d’Auvergne, musiques pourtant si
riches et stylées, véritables électrochocs
pour les amateurs de danse et de
violon. Il y a pourtant eu les deux
magnifiques disques de Jean-François
Vrod et du Trio Violon (Olivier Durif,
J.F.Vrod et J.P. Champeval). Ce
disque de Dzouga! s’inscrit dans cette
lignée de musiciens qui ne triche pas
avec le violon et cherche à en sublimer
toutes les potentialités. C’est une mise
à nue, une exploration profonde de
leurs instruments respectifs, avec en
ligne de mire ces notions-phares qui
étaient aussi celles des violoneux:
Energie de jeu, précision du geste,
recherche du timbre … et la cadence !
Laurence Dupré et Olivier Wely ont
transcendé leur héritage, exploitant
avec beaucoup de subtilité et d’inventivité
la forme à deux, on a rarement
vu duo jouer aussi bien de la fusion, du
contrepoint et des petites touches
imperceptibles qui transfigurent un
morceau. Le livret de ce CD, véritable
album de famille, livre la généalogie
des rencontres et les passeurs de ces
airs. A leur tour Laurence Dupré et
Olivier Wely s’inscrive dans cette
lignée des passeurs fervents et de
brillants musiciens ; si vous l’adoptez
ce disque risque de vous accompagner
longtemps ….
JIRIPOCA BAND
Computambor
Adieu monde cruel, pénétrez le doux
monde du Jiripoca band ! Un monde
aux voix feutrées, aux rythmes chaloupés,
aux tendres déclarations
d’amour. Le Brésil a ses recettes ; un
zeste de jazz, de rock et de bossa nova,
des accents romantiques en portugais,
le tout très honnêtement servi par des
musiciens à l’énergie contagieuse,
tous venus d’horizons divers et
sachant mettre à profit leurs héritages.
100% swing brasileiro !
LA MAL COIFFÉE
Polyphonies Occitanes
La « Mal couffade », grande polyphone
à six voix née sur les bords de
l’Aude, promène dans son cabas des
chants de vignes et de bistrots languedociens.
Perchée sur ses talons, elle a
le verbe haut et déploie avec générosité,
humour et puissance les chants
populaires de son pays. Autrement dit,
La Mal coiffée, c’est six copines bien
harmonisées qui revisitent les chants
trad de part chez elles, un groupe de
nanas faisant de polyphonies occitanes,
défiant tous les chœurs des alentours.
Les fins connaisseurs reconnaîtront
à la richesse des arrangements et
des jeux de rythmes qu’un certain
Laurent Cavalié est passé par là.
Modal / L'Autre Distribution / 2007
MPJ 111045
TOSS
World Trad Center
L’usage des samples (échantillonneurs)
dans la world music et dans la
musique trad’ est un locu comuni des
genres. S’il semble parfois grossier ou
fortuit, il n’en est rien dans l’album de
Toss. Il donne, au contraire, une profondeur
particulière à ses morceaux
(Tenacious est un exemple particulièrement pertinent à ce propos) qui, loin
d’assombrir ces derniers, mettent particulièrement
en valeur les instruments
acoustiques ainsi que la voix.
Inspirés par la musique irlandaise des
émigrants américains d’un côté, des
complaintes chantées spontanément
dans les pubs de l’autre, Tony Canton
et Jacques Tribuani (auxquels se
superpose Richard Bénétrix pour les
percussions additionnelles) réalisent
ici une performance de taille où énergie
et extrême finesse s’interpénètrent.
La qualité vocale, instrumentale ainsi
que l’originalité dans l’élaboration des
morceaux et dans les combinaisons de
timbres sont à souligner.
En somme, cet album ouvre grand les
bras, il est une invitation au voyage…
THE RAINBOW AFRICA
Une Afrique arc-en-ciel
Au fil de 10 chansons, c’est un appel
de l’Afrique du Sud qui vous traverse,
qui s’infiltre dans vos oreilles. Interprétations
de morceaux traditionnels
sud-africains au couleurs « typiquement
» africaines (mbira, marimba,
chants aux timbrex et structures repérables…),
d’autres morceaux sont là
pour proposer une modernité différente,
parfois surprenante ! Rencontres,
diversités, métissages,
dialogues ne sont pas des utopies mais
des réalités en action dans ce disque.
Les interprètes sont d’ici et de là-bas,
des musiciens professionnels accompagnés
par des chœurs d’enfants de
l’Ain. « The Rainbow Africa, une
Afrique arc-en-ciel » est le 7ème
volume du label discographique « Au
fil de l’Air » qui allie « musiques,
enfants et voix du monde », produit en
2007 par l’Estuaire et le festival Les
Temps Chauds.
L’Autre Distribution
777oraia777/1 - 2007
MÉMOIRES ACTUELLES
Musiques Traditionnelles de Bourgogne
C’est un heureux partenariat.
Mémoires Vives, association de
conservation et de valorisation des
cultures orales du Morvan s’est vu
confier il y a peu une mission régionale
d’archivage sonore. Musique
Danse Bourgogne, association en
charge du spectacle vivant de la région
Bourgogne, a de son côté demandé à
huit groupes des quatre départements
de Bourgogne une réinterprétation de
huit mélodies et chansons issues du
fonds d’archives sonores numérisées.
Ce CD « Mémoires actuelles » interroge
le patrimoine des chants et
musique de Bourgogne à l’aune de ses
groupes actuels, des timbres et des
rythmes de notre époque. Un exercice
de style intéressant qui autorise toutes
les audaces, les digressions et provocations,
et qui tout en mettant en perspective les répertoires patrimoniaux,
en dit également long sur les musiques
d’aujourd’hui. Le message est clair :
les musiques traditionnelles peuvent
devenir votre terrain de jeu.
MAO1/1- 15 Euros
LE BUS ROUGE
Le bus rouge, en marche depuis cinq
ans, relie Lyon à ses suds en roue libre.
Les dix membres de l’équipage fanfaron,
armés d’un attirail bigarré
(picolos, graille et hautbois, tambour
occitan, caisse claire, clarinette, saxophones
et cuivres) ont pris de la graine
de leur longue déambulation festive.
Ils livrent Tsoing, un carnet de voyage
bien bâti, avec un début, une apothéose
et une fin, autour de morceaux
du répertoire des hautbois du Languedoc.
Une composition charnue et
rugueuse qui alterne des passages de
prose débridée et des vers harmonieux
et profonds où se mêlent le basalte
auvergnat, les joutes sétoises, les vents
saturés et la peau haletante des tambours.
Le bus rouge n’est pas la fanfare
des éleveurs de Fin Gras du
Mézenc pour rien !
Disponible sur www.busrouge.com
PÈIRE BOISSIERE
Margarida
Les musiques des pays de langue d’Oc
se portent bien ! Nous avons été gâté
par les musiciens occitans ces deniers
temps qui du Cor de la Plana, en passant
par Familha Artus, Patrick
Vaillant, La Talvera, Dzouga , China
na Poun nous ont gratifié de très beaux
disques, intègres et inventifs. En voici
un nouveau à rajouter à la liste …
Peire Boissière est un chanteur rare et
peu prolixe. On n’avait certes pas
oublié son mythique « Passat deman »,
disque réalisé avec le Trio Cap Nègre
en 1999, Peire Boissière récidive avec
un disque solo qui laisse toute sa place
au chant. Il nous avait confié son
admiration pour la sculpture romane,
on la retrouve ornant la pochette de
son disque; son chant comme elle, va
droit à l’essentiel sans faux-fuyant.
Economie de moyens, épure et simplicité
pour ménager une rencontre
directe et sensible avec les répertoires.
Certains chants sont accompagnés du
tambourin à cordes béarnais, d’un claquoir,
ou d’une mâchoire d'âne, qui
forment de petites rythmiques aussi
discrètes qu’efficaces. Un timbre
rocailleux, un parler incarné, un chant
ornementé mais sans affectation, étroitement
lié à la langue occitane, à ses
rythmes et à ses accents … sans aucun
doute Peire Boissière est un grand
chanteur, encore trop méconnu à notre
goût.
Chanter en Pays d’Oc
Cinq Planètes
CP 09138
FAMILHA ARTHUS
Orb
Un esprit rock, des mélodies et chants
traditionnel gascon, une rythmique
électro … tout ceci donne le « cosmotrad
». Cet univers musical a vu le jour
avec le 1er album de la Familah « Omi »,
sorti en 2003. Sur ce nouvel album, on
ressent l’aboutissement de ce style, où
chaque influence a su prendre sa place
afin de donner naissance à un son bien
particulier. Tous ceux qui voient les
musiques traditionnelles comme des
musiques en rupture avec le présent
seront surpris de voir à quel point elles
peuvent être incorporées à des univers
actuels. Cette musique encrée dans la
tradition est en réalité plus qu’actuelle,
elle est novatrice, elle nous fait avancer,
elle surmonte les préjugés. S’il n’y
avait qu’un seul titre à retenir pour
représenter cet univers ce serait « Orb
». Titre de neuf minutes traversant de
multiples univers sans jamais sortir de
la mélodie traditionnelle. Je vous
laisse donc découvrir ce groupe qui
sans conteste ouvre les portes des
musiques traditionnelles. À découvrir
sur cd mais également sur scène où
leur univers prend une autre dimension.
[Collectif Ça-i->http://www.ca-i.org/] - L’Autre Distribution
LA MACHINE
Il est temps
Cuisine en formica, buffet de mamie
en arrière plan,... le décor est planté. Et
c’est là qu’ils trônent, instruments en
main et regard bien droit dans l’objectif.
Oui, les mecs de la Machine n’ont
pas froid aux yeux. Non seulement ils
chantent du trad’ en français alors
qu’ils sont jeunes (!!), mais à force de
le faire bien, ils sont en train de devenir
l'un des groupes les plus intéressants
du moment, sorte de locomotive
aux normes HQA (Haute Qualité Artistique)
pour toute une “new generation”
qu’on espère tout aussi inspirée...
Et on leur est vraiment reconnaissant
de distiller dans ces répertoires de
Centre-France un peu de leur kitsh élégant,
de leur romantisme décalé et de
leur inimitable groove, suave, fluide et
prenant, sans parler de la désormais
célèbre “ragga touch” du chant de l’insaisissable
Julien Barbances. Sur ce
deuxième CD, La Machine a poussé le
bouchon un peu plus loin et alterne des
morceaux instrumentaux d’une
grande maturité avec des morceaux
chantés plus déroutants. On s’émouvra
plus particulièrement pour ce
pauvre âne dont la triste histoire veut
qu’il tombe dans le fossé (plage 2). Et
le tendre, si chic et presque psychédélique
« Voici le mois de mai » qui rend
cette fin décembre plus légère. Attention
on vous prévient : la Machine à
groover est de retour ! Et ça balance...
Laissez-vous charmer, il est plus que
temps.
AEPEM - L’autre distribution
[www.lamachine.info
->www.lamachine.info]
[http://www.myspace.com/lamachinegang->http://www.myspace.com/lamachinegang]
A L'OMBRE D'UN ORMEAU
Brunettes et contredanses
Les musiciens de St Julien
François Lazarevitch
Deuxième CD de la très prometteuse
(et très ambitieuse) série intitulée 1000
ans de cornemuses en France, l’écoute
de « Al’ombre d’un ormeau » constitue
d’abord un moment de raffinement
musical des plus exquis.
Dans ce deuxième CD, François Lazarevitch
et les musiciens de Saint Julien
s’emparent de quelques-uns des répertoires
du XVIIIème siècle où la
musette tient une place de choix :
contredanses, brunettes et menuets. Et
si l’on reconnaît ça et là quelques
thèmes populaires (plages 1 et 7
notamment), on découvre avec bonheur
des thèmes qui sont loin d’être
omniprésents dans le paysage musical
actuel.
Ainsi l’instrumentarium quasi
baroque (clavecin, basse de viole, violon,
…) et parfaitement adapté au
répertoire nous emmène dans un futur
des passés avec légèreté, finesse et
souplesse et dans une diversité de formats
où l’alternance entre moments
musicaux et vocaux montre toute la
richesse de ces répertoires.
Un CD qui devrait ravir les amateurs
de musique du siècle en question mais
plus largement de musiques traditionnelles,
tant la démarche d’interprétation
des répertoires présente de similitudes.
On apprécie également le livret
qui, comme ce travail le mérite, vient
efficacement guider une écoute peutêtre
plus analytique de ce CD par certains
amateurs.
On attend évidemment la suite…
comme dans toute bonne saga qui se
respecte !
ALPHA 115
[www.alpha-prod.com->www.alpha-prod.com]
TRACES
Stephane Mauchand et Gérard Chazot
On retrouve dans ce CD la trace évidente
de deux compères bien connus
des amateurs de Valsepareille, notamment
dans le répertoire et le choix de
certains morceaux largement interprétés
dans le trio par le passé.
Les guitares de Gérard Chazot enchaînent
des riffs inspirés, et rythmiquement
bien vus, sans jamais cesser de
soutenir la mélodie avec autant d’efficacité
que de justesse. Ce bon jeu de
Dadgad -parsemé ça et là d’harmoniques
éclairantes- constitue un terrain
de jeu particulièrement propice à l’expressivité
de Stéphane Mauchand et
des mélodies qu’il développe sur
divers instruments (tin et low whistles,
clarinette diatonique, …) Les cornemuses
tiennent évidemment une place
de choix dans cet album haut en relief,
alternant passages de repos et de haute
intensité. On notera d’ailleurs
quelques belles envolées dont on n’a
pourtant l’impression qu’elles pourraient
aller encore plus loin, notamment
au milieu du morceau Le
Malido. On s’y verrait bien presser un
peu plus sur la poche ou déboucher un
demi quart de trou supplémentaire
pour creuser encore la dissonance
dans ce passage un peu trop… court !
On notera aussi un travail assez subtil
sur le mixage, notamment sur les derniers
thèmes (10 et 11) qui, quelque
peu surprenants dans l’énergie, viendront
probablement réveiller l’auditeur
endormi qui pensait avoir tout
compris tout de suite.
Simplicité et complicité musicale
-évidente- font de cette perle rare (le
tirage relèvant quasiment du « collector
») un objet dont on a assurément
pas envie de perdre la trace…
SMGC A062007
[En vente à la boutique du CMTRA->http://www.cmtra.org/boutique/]