CMTRA : Comment le « Tram » a-til
poursuivi sa route ?
Diego Meymarian : Ça fait maintenant
six ans que Le Tram des Balkans
existe. Il y a eu un gros virage récemment
quand une batterie est arrivée
dans le groupe. Jusque-là on avait une
instrumentation plutôt traditionnelle :
violon, contrebasse, clarinette, accordéon
et chant. Ça faisait longtemps
qu’on avait envie d’avoir une batterie
parce que ça met énormément d’énergie
surtout pour des musiques festives !
En plus Mathieu, notre batteur n’est
pas un batteur très conventionnel.
Nous avons également enrichi notre
palette sonore d’une mandoline qui
amène une dimension supplémentaire.
Vincent Westphal : C’est vrai que
notre répertoire est très festif, même si
certains morceaux sont plus intimistes.
En tout cas ça reste avant tout des
musiques de scène, de spectacle ou à
partager, des musiques qui se vivent
avec un public.
On s’est toujours situé du côté des
musiques traditionnelles mais jamais
au sens puriste. On n’a jamais cherché
à retransmettre très exactement
une tradition musicale et culturelle qui
n’est pas la nôtre. On est tous d’horizons
très différents et on a construit le
groupe autour de l’amour des répertoires
klezmers en particulier, à partir
d’une interprétation assez personnelle.
Depuis l’arrivée de la batterie, on se
sent vraiment à la croisée entre les
« musiques trad » et les « musiques
actuelles ».
On donne également de plus en plus de
place à nos compositions où l’on sent
l’influence de ces traditions musicales,
surtout dans les choix d’arrangements,
mais qui sont faites également de citations,
d’emprunts au ska, aux
musiques irlandaises, tchèques ou
roms.
Elles viennent de tous les membres
du groupe. Quelqu’un propose un
thème et ensuite on construit
ensemble. On puise dans différentes
palettes musicales pour proposer
quelque chose qui soit plaisant, varié,
qui s’enchaîne bien…
On s’est rendu compte par ailleurs
qu’on aimait de plus en plus chanter et
que le public était vraiment très sensible
et réceptif à ça. On est trois chanteurs
sur scène et ça permet de varier
les timbres, les couleurs. Maintenant
ça représente à peu près un tiers de
notre répertoire et c’est très agréable.
Votre second album, enregistré en
concert, va sortir en février. Le fait
que ce soit un live, c’est parce que
votre musique ne tient pas en studio ?
DM : C’est un choix, parce qu’en live
on sent bien l’énergie qui se dégage du
concert. Cet été on a beaucoup joué et
ça nous a permis de bien roder le
répertoire, de toucher à des choses
qu’on ne pouvait pas toucher avant et
de transmettre cette énergie-là. Les
gens qui viennent à nos concerts pourront
repartir avec un objet qui
ressemble vraiment à ce qu’ils ont vu
sur scène. Ça triche pas, c’est pas du
montage ou des prises séparées mais
une musique brute, avec des imperfections.
Ça nous semblait plus juste par
rapport à ce que l’on voulait transmettre
par un disque.
D’une certaine manière, on s’attache
autant au son qu’à l’image. Je crois
que ça passe beaucoup par là, les gens
aiment voir qu’on se fait plaisir. Le
côté visuel, le côté spectaculaire transparaît
davantage dans un enregistrement
live. Le côté rock’n’roll est vraiment
là aussi. On est tous équipés de
micros sans fil, on peut sauter en l’air,
descendre dans le public. Ça se vit corporellement,
visuellement.
Dans quels types de lieux jouez-vous
et pour quels publics ?
DM : Pour le moment nous jouons
essentiellement dans la région Rhône-
Alpes. On fait un peu de tout. Cet été
on a notamment beaucoup joué en
Isère et on a fait aussi bien de grosses
scènes avec du gros son (comme pour
la première partie des Fils de Teuhpu)
que des concerts plus intimes comme
pour les Fermades dans le Vercors,
chez des agriculteurs, dans un jardin
sous un noyer ou bien dans les alpages
à 1000 mètres d’altitude. On a également
joué dans un gymnase, dans un
festival folklorique. Nous adaptons
notre prestation selon les lieux et les
conditions techniques : nous pouvons
jouer en formule semi-acoustique avec
des percussions légères ou sortir
l’artillerie lourde !
VW : C’est quelque chose qui m’impressionne
de plus en plus. Au dernier
concert il y avait des retraités, des
jeunes, des enfants, un public extrêmement
varié. J’ai l’impression que ça
dépasse les clivages de générations
ou de styles. Ça fait chaud au coeur, ça
donne envie.
L’arrivée de la batterie nous a permis
de nous ouvrir à un réseau de salles
de musiques actuelles.
Vous êtes également engagés dans
une démarche de transmission…
VW : Oui, on va faire des ateliers
auprès de scolaires et d’étudiants en
école de musique. L’idée est de transmettre
nos connaissances des répertoires
de musique klezmer et de
musique d’Europe de l’Est en général
à partir d’un travail vocal et de percussions
corporelles. On va travailler
sans partitions, ce qui reste assez inhabituel
et l’objectif final est une
production, une présentation de ce que
les stagiaires auront acquis, associée
à un concert du Tram. Nous avons hâte
de voir ce que ça peut donner !
Propos recueillis par Y.E.