Entretien avec Mohamed
Sidrine et Juan David.
CMTRA : Le 1er trimestre 2006 au
6ème Continent ne rime-t-il pas
avec vitalité ?
MS : Oui, c'est certain mais le dynamisme
actuel du 6ème continent s'inscrit
dans la suite logique de ce qui s'y
est passé depuis 2 ans et du travail de
fond réalisé par l'association depuis 10
ans. La salle s'installe petit à petit,
s'encre dans son territoire et acquiert
une visibilité à Lyon, dans l'agglomération
et même au-delà. Certains
signes ne trompent pas : refuser des
gens à l'entrée des concerts -même si
ce n'est pas le but- en constitue un fort.
De même, depuis le lancement de la
nouvelle saison il y a 4 mois, le
nombre d'adhérents a atteint près de
1500, c'est énormissime !
Que vient spécifiquement chercher
le public au 6ème continent ?
MS : Je doute qu'il existe autant de
lieux où il soit possible d'appréhender
la diversité telle qu'on la propose
ici : assister à un concert africain
(togolais, congolais, sénégalais, ...),
rencontrer un écrivain écossais, visiter
une exposition d'un japonais, participer
à un stage de danse du sud de
l'Inde, ... Notre projet et notre lieu
répondent à une attente de diversité et
de découverte.
La pluridisciplinarité ajoutée à la
dimension conviviale du lieu font la
différence. Le 6ème Continent
grouille, bouillonne, il est « lieu de vie »
dans lequel chacun vient chercher
réponse à un besoin de proximité.
Prenons l'exemple des cours de danses
africaines, il y en a partout à Lyon ! Or
chez nous, à partir d'octobre, tous sont
complets. Ce qui fait la différence,
c'est le lieu, un espace centré sur
l'échange.
Trois axes fondent les piliers du
projet associatif : la dimension
scientifique, la diffusion et l'aide à
la création. Sur ce dernier aspect,
un collectif vient de se former :
« La grande Métisse. » Quelle idée
a précédé le début de cette aventure ?
MS : Là aussi, on comble un vide. A
l'ouverture de ce lieu, de nombreux
musiciens de tous horizons sont venus
jouer spontanément. Un constat a
émergé : une multitude d'individus
gravitent autour de l'association et ne
cherchent qu'à se rencontrer. Comprenant
que ce lieu prenait des allures de
« vivier d'artistes, » la question s'est
posée : pourquoi ne pas construire un
collectif autour d'un projet de mise en
réseau des différents acteurs ?
JD : Deux niveaux d'enjeux se distinguent
: les boeufs et le collectif. Au
début, Mohamed organisait des boeufs
informels tous les jeudis. Sans enjeu,
nombre d'amateurs y prenaient part,
l'idée consistait à favoriser la rencontre
et l'échange de musiciens amateurs
autour de leur pratique. Concernant
la Grande Métisse, le projet rassemble
des musiciens professionnels
ou en voie de professionnalisation
qu'on tente de faire se rencontrer dans
une perspective d'aide à la création.
MS : Les professionnels du collectif
seront bientôt liés par une charte
signée par tous, il y a donc bien acte
d'adhérer, de s'inscrire dans un projet
et de s'y engager. En terme administratif,
le 6ème Continent accompagnera
les artistes du collectif via la
mise à disposition des locaux de répétition
entièrement équipés, de répétitions
montées, de mise en réseau, la
mise à disposition d'agents, l'aide à la
signature de contrat, de formation, de
conseils juridiques, d'un dispositif de
déclarations... Beaucoup de musiciens
débarquent ici et sont un peu
« largués. » Le lieu leur permet d'en
connaître davantage sur leurs droits
et devoirs, les déclarations administratives,
et contribue ainsi à leur
intégration au sein de paysage culturel
lyonnais.
Vers quoi tend ce collectif ?
MS : Deux espérances guident l'avenir
du collectif. D'un côté, nous souhaitons
que des petites formations naissent
de ce collectif. De l'autre, nous
souhaitons que « la Grande Métisse »
soit diffusée largement, avec l'espoir
d'en faire une formation de renommée
nationale, voire internationale qui
fonctionnerait un peu sur le modèle de
l'ONB mais plus ouvert sur le monde.
Le 6ème Continent dispose d'un
comité scientifique, comment fonctionne-
t-il ?
Parmi les gens qui nous entourent et
qui étaient intéressés par ces questions,
certains ont constitué un conseil scientifique.
Ce dernier nous aide à réfléchir
sur les grandes orientations de l'association
et à organiser des débats sur les
questions de métissages, de brassages
culturels. Des rencontres ont déjà eu
lieu dont une autour de l'interculturalité
et une autre intitulée « La créolisation
» avec le concours de Françoise
Verges.
On tente de redonner un peu de visibilité
à cet aspect, ce travail souterrain
mais ô combien fondamental
mérite de « (re-)faire surface. » La prochaine
rencontre devrait avoir pour
objet la rencontre entre traditions et
nouvelles technologies : thème de la
8e édition du festival 6e Continent.
Le festival 2006 va avoir lieu en
juin, quelles pistes y explorerez-vous
?
MS : Exposition d'arts visuels, contes,
projection de films accompagnés de
créations sonores sont quelques-uns
des rendez-vous à ne pas rater. Musicalement,
les concerts se dérouleront
au parc de Gerland et au coeur du 7ème
arrondissement. Nous souhaitons ainsi
inscrire le festival dans l'espace
urbain, au coeur de la ville et au plus
près des gens, c'est la particularité de
2006. Le 9 juin, les concerts se passeront
places Raspail et Saint Louis ; le
10, soirée de clôture, les concerts
auront lieu dans dix lieux différents
une vingtaine de bars. La programmation
n'est pas encore tout à fait bouclée
mais à priori, on retrouvera (sous
réserve de modifications : Alpha
Blondy (invité de cette édition),
Orange Blossom, Massaladossa, Electro
Gnawa Project, Desert Rebel, Dj
Awal, Papa Diabaté & Morgan Electro
Project, DjemDi... La création reste
au centre du festival également, car les
rencontres entre les Gnawa de Marrakech
et Dj Fred, Dj Spider et Stani
(Peuple de l'Herbe); Papa Diabaté
(Guinée) et Morgan (Bretagne), le
conteur Patrice Kala et le vidéaste
Gregory Lassère... sont distinguées et
accompagnées par le 6e Continent.
Propos recueillis par J.S.E.
Contact
6e Continent
51, rue Saint Michel -
69007 Lyon
M° Saxe-Gambetta
04 37 28 98 71
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