L'actualité de ces dernières semaines montre que les problématiques liées au régime spécifique de l'intermittence ou encore au financement et à la reconnaissance des « musiques actuelles »
occupent une place toujours aussi primordiale dans l'espace de réflexion des acteurs de la vie culturelle et artistique, tant au niveau régional qu'au niveau national.
Suivent dans cette page, trois participations subjectives* à ce débat, celui relatif à l'instauration du Conseil Supérieur des Musiques Actuelles signé par Pierre-Olivier Laulanné, celui de
Jean-François Vrod posant la question de la démocratie culturelle soulevée par la crise de l'intermittence et enfin, la contribution d'humeur d'Olivier Durif concernant le «FORUMA».**
Par un arrêté du 4 janvier 2006, il a été
institué auprès du ministre de la
culture, un Conseil Supérieur des
Musiques Actuelles. (CSMA)
Suit ensuite une liste des personnes et
structures représentées : 6 membres de
droit (représentant le Ministère de la
culture), 6 représentants des collectivités
territoriales, et 18 représentants
d'organisations professionnelles,
proposés par leurs organisations et
nommés pour 3 ans.
Ce conseil doit
faire des propositions dans le domaine
des politiques en faveur des musiques
actuelles.
Nous avons été nombreux à nous étonner
de cette annonce faite par le Ministre
au Foruma* à Nancy, en octobre 2005,
annonce censée répondre à notre
demande de pérennisation de la
Concertation Nationale Musiques
actuelles.
Cette concertation réunissait, depuis
18 mois, des représentants du MCC,
des Collectivités territoriales et les
acteurs, d'une façon souple avec pour
objectif de définir une méthode et un
plan pour une politique nationale et
territoriale des musiques actuelles.
Il était évident dans le champs des
Musiques actuelles, de la nécessaire
triangulation, Etat / Collectivités /
Acteurs pour mettre en place des
politiques publiques sur le secteur.
Comment en effet imaginer faire en
oubliant les acteurs ? On pourrait
même s'étonner que ce soit si innovant
d'associer les acteurs et les citoyens
aux politiques publiques qui les
concernent.
Il était aussi évident qu'une politique
publique cohérente sur le secteur, ne
pouvait également pas intervenir que
sur le secteur de la diffusion (réforme
du financement des SMAC) mais sur
l'ensemble de la chaîne, de la pratique
amateur, en passant par la formation,
la professionnalisation, le concert, la
médiatisation ou le disque....
Signalons à ce stade, le travail du
GEMAP, une plate forme de discussion
et de travail que nous avons mise
en place à partir des BIS de Nantes en
2004, et qui a permis en même temps
d'harmoniser et de faire évoluer
ensemble les acteurs et de dynamiser
la Concertation nationale avec des propositions
étayées et construites.
Bref, notre objectif actuellement est de
garder autant que possible, le fonctionnement
souple qui prévalait au sein
de la Concertation. Pour cela, le
GEMAP, qui devra étendre la concertation
aux autres acteurs du collège
professionnel du CSMA, a proposé
lors de la première réunion, un
règlement intérieur et un texte fondateur
(voir sur www.famdt.com) qui ont été
adoptés dans leur principe.
Le CSMA a devant lui 2 enjeux : le
premier est de réussir la transposition
de la méthode de concertation et de coélaboration
des politiques publiques
concernant les musiques actuelles, en
région. Le second est d'obtenir les
moyens minimum pour assurer une
coordination à minima des travaux du
CSMAet des différentes commissions.
Cette coordination passe par des
moyens de communication souples et
interactifs qui permettent des
contributions publiques des uns et des
autres à l'instar de ce que nous avons
fait fonctionner pour le FORUMA.
Pierre-Olivier Laulanné
Directeur de la FAMDT
illustrations : Rémi MALIN GRËY
*Ces contributions
restent sous la
responsabilité de
leurs signataires et
ne sauraient engager
la direction éditoriale
de la lettre du CMTRA.
**sur le site
[http://www.foruma.fr->http://www.foruma.fr],
vous trouverez les
compte rendus des 19
ateliers, et toutes les
contributions ante et
post Foruma, des ressources,
et plein
d'autres dessins
comme ceux ci, ...
bref une mine !
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Politique de la
Musique en France :
Pour un autre
partage !
« Dix pour cent du budget de la
Musique en France sont
aujourd'hui consacrés au
développement des musiques
actuelles » s'est écrié
victorieusement à Nancy cet
automne un des participants du
Foruma, résumant, à juste titre de ce
fait, prés de dix années d'effort de
l'Interfédération et des acteurs des
musiques actuelles, sollicitant dès
1997 la Ministre de l'époque
Catherine Trautmann pour qu'un
plan de financement du secteur soit
mis en route.
Aujourd'hui les musiques actuelles
représentant, autant qu'on puisse le
savoir, probablement quatre vingt
pour cent des pratiques musicales en
France, on est en droit de se poser la
question suivante, toute simple :
Aquoi et à qui sont consacrés les
quatre vingt dix autres pour cent des
budgets musicaux ?
Il faut le dire sans haine mais
également sans détours : A la
pérennisation du seul genre musical
de la musique académique, que la
République continue d'entretenir,
sans aucune transparence, comme
une religion officielle, avec ses lieux
de cultes, les écoles dédiées à son
enseignement, ses festivals et lieux
de réjouissances sur-financés par
l'impôt du contribuable.
Cet ordre symbolique, largement
soutenu par le poids des institutions
et des corporations professorales et
artistiques qui en vivent mais
également par le laxisme suranné de
la sphère politique à son sujet, n'est
pas juste. Et il n'est pas seulement
injuste pour les autres genres
musicaux qui continuent à danser
devant le buffet... Il l'est également
par la sur-représentation d'un art
incapable, et pour cause
(c'est pas son problème !),
d'affronter un univers sonore
contemporain dont pourtant toute
musique devrait être le principal
cadre d'expression.
La simple démocratie mérite que
tout un chacun ait droit au choix de
l'universalité de la musique
aujourd'hui sans être obligé de se
frayer un passage (quand il y
parvient) au travers d'une institution
qui continue principalement à
professer “ les musiques du
répertoire” et les techniques qui leur
sont liées, en une société hors du
temps.
Et si l'on peut convenir que, dans la
mosaïque sonore des musiques
qu'elles rassemblent, les musiques
actuelles ne sont pas un concept
artistique aujourd'hui, elles sont
avant tout un espace de démocratie
musicale, nécessaire pour sortir la
musique en France du cadre
antédiluvien dans lequel on continue
de l'entretenir et qui formate de façon
massive et durable tous les accès du
public et des praticiens à la Musique.
Olivier Durif
Musicien, Directeur du CMTL,
Président de la FAMDT